Une étoile qui brille mieux que les autres [PV: Ma soeur]

[Hôtel. Hall.]

Les bagages que je gardais avec moi tenaient en seulement trois valises. C'était peu, pour une jeune femme, surtout si on considérait que je n'avais pas que du maquillage et des vêtements à trimballer. Bien sûr, l'essentiel de mon matériel de travail était éparpillé un peu partout à travers San Francisco, dans de multiples cachettes plus intéressantes les unes que les autres.

Je me dirigeais donc vers le comptoir de la réception avec un air des plus innocents et trois valises qui roulaient derrière moi, attachées les unes aux autres, telles les wagons d'un petit train. Avec mon jean, mes talons hauts et ma camisole toute simple, je ressemblais à toutes ces jolies demoiselles qui n'avaient jamais tué personne. Douce nostalgie de cette époque où je ne connaissais rien de la vie...

Accoudée au comptoir, je suivis du regard un employé de l'auberge qui semblait débordé par sa paperasse, pour finalement s'arrêter sur sa collègue qui venait de prendre place devant moi, de l'autre côté du comptoir en question. C'est à ce moment que je lâchai la poignée de ma valise-locomotive pour attraper la personne devant moi, un air hystériquement joyeux plaqué sur le visage.

-SARA?! Mais qu'est-ce que tu fais ici?? MA Sara ici? J'y crois pas!

Invité

Aujourd'hui, Sara aurait aimé aller dehors, lire un peu, ou bien même, dormir, mais aujourd'hui elle travaillait. Avec Christo qui plus est. Elle était épuisée, de mauvaise humeur et quelque peu désemparée. Depuis quelques mois, elle avait perdu son entrain habituel pour le remplacer par un voile de tristesse qui couvrait maintenant son regard. La petite éteincelle s'était éteinte depuis le fameux souper avec Maverick. Elle ne l'avouerait pas, mais depuis ce soir là, elle n'est plus la même. Elle regratte énormément ses agissements de ce soir là. L'impulsion l'avait fait régir bien trop brusquement ce qui, naturellement, avait poussé le jeune homme à s'éloigner de Sara.

Elle était donc là, des mois plus tard, en compagnie d'un homme qu'elle n'appréciait pas vraiment [et qu'elle apprécierait encore moins si elle savait que c'était LUI de copain de Maverick], à travailler comme une automate à la reception d'un hôtel qui la charmait bien moins qu'avant. Le client suivant venait de se présenter, elle leva donc machinalement la tête armée d'un sourire trop souriant et d'une voix trop aigü.

-Bonjour.

À la place du client régulier qui aurait dû se trouver là, une ombre du passé qui était resté muette si longtemps se trouvait au comptoir. Apparemment, la jeune femme l'avait reconnue aussi puisqu'un sourire éxagéré maquillait son visage.

-SARA?! Mais qu'est-ce que tu fais ici?? MA Sara ici? J'y crois pas!

Elle aurait dû être plutôt heureuse de revoir sa demi-soeur, mais le coeur n'y était pas.

-Ashley??? Moi je travaille ici, c'est normal que j'y sois... mais toi??? Qu'est-ce que tu fais ici?

En entrant dans le hall, j'avais tout de suite remarqué ce pauvre con, là-bas, à gauche. Non, pas lui, l'autre! Oui, celui-là. Il me regardait comme si j'avais porté seulement des sous-vêtements en dentelle noire et que je n'attendais que le moment où il viendrait me prendre sauvagement sur le comptoir de la réception. Pauvre con. Je ne couchais pas avec des types du genre. Premièrement, je les préférais plus musclés. Ensuite... J'aimais bien partager mon lit avec des hommes plutôt brillants. Les demeurés ne m'attiraient pas, si jolis pouvaient-ils être, parfois. Il me fallait le meilleur des deux mondes: beau et intelligent. J'étais difficile; je le savais, mais je ne pouvais abaisser mes critères et baiser n'importe quel bâtard imbécile.

Donc, pour en revenir à ce mec d'un quotient équivalent certainement celui des gens participant aux télé-réalités, je décidai de m'amuser un peu, juste un peu, à ses dépends. Quand je le vis s'avancer vers moi, gonflant ce qu'il devait considérer comme des muscles à la manière d'un macho de l'époque préhistorique, je lui fis mon plus beau sourire... avant d'utiliser mon pouvoir et de rendre ce pauvre chou (il n'était guère plus intelligent) si triste qu'il se mit à sangloter subitement, au milieu du hall de l'hôtel. Je m'étais ensuite désintéressée de lui et de ses pleurs pour hurler en voyant ma douce Sara.

-Ashley??? Moi je travaille ici, c'est normal que j'y sois... mais toi??? Qu'est-ce que tu fais ici?

Entre les paroles de ma soeur adorée, j'entendais les sanglots du nul de premier niveau qui ne bougeait pas du sol, là où il s'était laissé glisser, à genoux. Je ne cessais de sourire.

-Eh bien... j'emménage!!! On va pouvoir se voiiiiir!!!!!! Dis, tu as bientôt une pause? Tu finis à quelle heure? Il faut que tu me racontes ta vie EN DÉTAILS! Ah, et j'ai un copain.. Il va falloir que je te le présente; le mec parfait, tu vas voir... Je suis TELLEMENT heureuse de te voir!!!! Je te croyais à l'école ou quelque chose du genre... Et là, je te retrouve ici!

Au bout de deux éternités, je me tus enfin, sans toutefois enlever mes mains qui s'étaient serrées sur les épaules de MA Sara.