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Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm]

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Cedrik Manners

Cedrik Manners

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MessageSujet: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptyMer 28 Sep - 19:18

Cedrik Manners détestait l’automne depuis plusieurs années. En fait, il n’aimait aucune saison en particulier, leur trouvant à chacune des défauts qui les rendaient invivables. Pour l’été, c’était évidemment la chaleur. Comment arriver à attirer les clients au lit si tout ce qui les intéressait était de se rafraichir? Manners étant d’un style plutôt frileux, les grandes chaleurs ne l’affectaient pas trop, mais il faisait souvent affaire avec des hommes plus âgés sur lesquels la température avait une plus grande emprise. Au moins, les canicules lui offraient un peu de repos, autant parce que les clients préféraient se prélasser sur le bord de leur piscine que parce qu’ils nécessitaient les services des gens comme Cedrik pendant moins de temps. L’hiver, au contraire, les clients se faisaient plus nombreux. Ils avaient besoin qu’on les réchauffe. Ils se sentaient seuls dans le froid. Le jeune drogué n’aimait pas avoir froid et détestait particulièrement les clients du temps des fêtes, lesquels ne se contentaient généralement pas de le baiser et partir. Ils parlaient. Dieu qu’ils parlaient. De leur vie, de leurs regrets ou, pire, de leur solitude. Ils pensaient que, parce qu’ils laissaient un petit supplément de jour férié, ils avaient le droit d’ennuyer prodigieusement Cedrik avec tout ce qui les rendait pathétiques jusqu’à la moelle. De bien tristes victimes de la vie. Des gens qui ne s’en sortiraient probablement jamais, parce que réussir équivaudrait à perdre ce qu’ils sont, pourquoi ils vivent. Certaines personnes sont nées pour être perdantes et il ne faut surtout pas leur faire comprendre qu’elles peuvent changer. Ce serait comme un nouvel échec; le pire. Le printemps chassait au moins ces clients au cœur brisé et aux rêves constamment déçus. C’était peut-être la saison la moins affreuse, et ce n’était certainement pas à cause des fleurs et des papillons. En grande ville, la nature apporte plus de contraintes que de beautés. Ce qui ne répugnait pas totalement Cedrik du printemps, c’était l’humeur des gens. Comme motivés, presque changés, par le beau temps qui arrivait, ils semblaient transportés d’une joie un peu illogique. Les clients étaient plus généreux, plus personne ne mourait de froid dans le fond des ruelles à cause d’un voyage artificiel mal surveillé… Presque la belle vie.

L’automne, toutefois, n’avait de positif que le début des cours. La seule excuse que Cedrik se permettait pour manquer des jours de travail. Durant les vacances, son horaire se divisait entre la drogue et les moyens pour s’en procurer. De toute manière, il n’avait rien d’autre à faire et il ne devait surtout pas se retrouver trop longtemps seul à pouvoir réfléchir. Quand Cedrik Manners réfléchissait, il semblait que rien de bien reluisant ne pouvait en ressortir. D’un point de vue extérieur, l’automne lui collait bien. Comme lui, Manners devenait plus terne au fil du temps, plus froid, plus déprimant… Il était plus faible que l’hiver, moins beau que l’été… Il n’avait sa place que pour servir aux autres. Et Cedrik était encore plus sombre et cynique qu’à son habitude lorsque les arbres n’avaient plus que quelques feuilles. Chaque goutte de pluie glaciale, chaque feuille brunie sur le sol, chaque coup de vent d’octobre ou de novembre lui rappelait la mort. Oh, ce n’était pas très original, penser à la mort par ce temps gris et froid, mais Cedrik avait ses propres raisons, ses propres fantômes. Des années plus tôt, alors que les enfants choisissaient leur costume pour Halloween qui approchaient, le petit Manners, alors âgé de treize ans, se voyait plutôt obligé de regarder la grosse boîte contenant le corps de sa mère s’enfoncer dans la terre en serrant très fort la main de sa petite sœur. Deux années s’étaient écoulées avant qu’un autre automne ne vole un ange pour l’enfermer dans un petit cercueil blanc. Et Cedrik était alors trop vieux pour serrer la main de la seule famille qui lui restait.

Manners était donc d’humeur extrêmement sombre et maussade dès que se pointait le mois d’octobre, et cela durait au moins jusqu’à la fin de novembre. Cette année, il avait inconsciemment prévu le coup en faisant quelques réserves durant l’été. Novembre était donc déjà entamé et, malgré le temps que lui prenaient les cours, Cedrik ne manquait pas de ces substances qui lui rendaient la vie moins affreuse. Ce soir-là, pourtant, il aurait préféré en avoir encore plus pour disparaître complètement dedans. Mieux, il aurait aimé se droguer au cyanure, pour être certain que les effets ne se dissipent pas trop vite. Cependant, animé d’un minime instinct de survie, il se contenta de son type de consommation habituel, mais en un peu plus grande quantité. Après tout, c’était une occasion spéciale. Un anniversaire.

Cedrik desserra doucement le bout de tissu qu’il avait pris pour faire saillir la veine de son bras et il le jeta quelque part dans sa chambre. Il le ramasserait plus tard. Puis, il s’allongea et ferma les yeux pour savourer tranquillement le petit voyage qu’il s’offrait, ce soir-là. Au bout d’à peine quelques minutes, toutefois, il sentit que quelque chose n’allait pas. Son esprit dérapait. Ou son corps? Ou tout le reste. Les yeux grand ouverts, Manners fixait le plafond de sa chambre pour se rassurer, mais les ombres qui s’y dessinaient ne l’aidaient vraiment pas. Il lui semblait même qu’elles murmuraient; et il ne voulait pas écouter ce qu’elles avaient à dire. Il vit la faible lumière qui lui parvenait du lampadaire non loin de la fenêtre de sa chambre s’éteindre subitement et, lentement, il se redressa sur son lit. Mais que se passait-il? Il détourna le regard de sa fenêtre pour regarder à nouveau le plafond. Rien. Les ombres avaient disparu, mais il ne se sentait pas mieux : elles murmuraient toujours. Il les entendait, malgré son cœur qu’il sentait battre à un rythme démesuré. Il se passait quelque chose avec sa chambre.

Manners se leva donc de son lit et recula jusqu’à la porte, son regard sombre scrutant chaque recoin de sa chambre à la recherche d’une quelconque menace. Sa main rencontra le verrou de la porte qui semblait s’obstiner à s’ouvrir. Le jeune homme finit par se tourner vers la porte pour s’y mettre à deux mains sur ce foutu verrou qui ne voulait rien entendre. Après l’avoir secoué violemment et seulement après avoir frappé de toutes ses forces dans la porte, Cedrik entendit le cliquetis rassurant du verrou qui obéit enfin et il sortit précipitamment de sa chambre. Il se dirigea alors vers la porte de sortie de l’appartement, laquelle lui semblait toujours de plus en plus loin. Il était déjà à bout de souffle lorsque, à quelques pas de sa chambre, il se cogna contre une chaise et perdit équilibre. Son corps frêle s’écrasa lourdement sur le sol et les murmures s’intensifièrent pour ne former qu’un seul mot qui se répétait encore et encore : Meurtrier.
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Malcolm Gillian

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MessageSujet: Re: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptyJeu 10 Nov - 22:55

[Je suis impardonnable et je m'en excuse!!!]

Malcolm Gillian n’aimait pas vraiment l’automne, simplement parce qu’elle annonçait l’hiver. Et c’était définitivement l’hiver la saison que Malcolm détestait le plus. Il faisait toujours trop froid, il ventait toujours trop, il y avait toujours beaucoup de glaces, beaucoup d’accidents aussi et il y avait même trop de neige à son goût… L’automne était significatif de mort. Et de rien d’autre. Mort de la nature, mort de la chaleur, mort de la joie de vivre, mort à perte de vue. Le pire, c’était que dès son arrivée, l’automne glaçait l’air. Comme ces personnes qui ont le don de faire en sorte que tout le monde arrête de parler lorsqu’elles entrent dans une pièce. C’était exactement la même chose. Les feuilles et les oiseaux étaient la preuve que l’automne n’apportait rien de bon. Il y avait quelque chose chez l’automne qui faisait en sorte que tout le monde voulait partir ailleurs. Et, à défaut de pouvoir partir ailleurs, le réflexe de la plupart des gens était de rester enfermé dans leur maison. Les rues étaient de plus en plus vides, la vie s’affaiblissait. L’automne gagnait à chaque fois. Malcolm n’aimait pas quand on avait le dessus sur lui. L’automne et l’hiver réussissait parfois et ça le fâchait toujours autant…

À chaque année, lors de la rentrée, Malcolm se disait qu’il aurait mieux fait de partir en voyage. Quelques années avec pour seule compagnie un sac à dos et un sac de couchage, autour du globe, lui aurait peut-être éclaircit les idées. Malcolm n’aimait pas l’automne également à cause de la rentrée, justement. La rentrée était toujours synonyme de mauvais souvenirs et de remords, pour Gillian. Il ne pouvait pas s’empêcher de repenser à la rentrée qu’il n’avait pas eu parce qu’il était en cure. Automatiquement donc, il repensait à Leah et il n’aimait pas ça non plus. Repenser à tous ces mauvais souvenirs était comme donner de l’importance à quelque chose qui n’en méritait pas. Malcolm prônait de laisser le passé derrière nous et de seulement regarder vers l’avant, sans jamais se retourner, mais lorsque l’automne arrivait, avec sa copine la rentrée, tous ces beaux sermons disparaissaient. Il replongeait dans un état d’esprit qu’il ne voulait plus associer à lui. Il retombait dans ses souvenirs les plus atroces. Il ressentait à nouveau le terrible trou dans sa poitrine. Il n’aimait pas ça. Pas du tout. C’est donc pourquoi il se disait qu’en ne vivant pas quelques rentrées d’affilée, il serait peut-être guéri. Par contre, il ne pouvait pas agir ainsi. Il ne pouvait pas tout abandonner derrière lui et partir en voyage, ses parents ne lui pardonneraient jamais. Ils seraient même capables de mettre toutes les polices du monde entier après lui, question d’être certains qu’il revienne finir ses études. Malcolm ne savait même pas s’il voulait réellement finir ses études. Il avait de plus en plus l’impression que le merveilleux parcours de vie qu’il est entrain de se dessiner ressemble plus à un gribouillage d’enfant et que c’est son père qui lui tient la main pour dessiner.

Depuis quelques temps, Malcolm ne se reconnaissait plus. Heureusement, sa morosité caractéristique de la rentrée et de l’automne était disparue. Mais c’était semblable à si quelque chose en lui était comme un volet mal attaché lors d’une grande tempête. Il sentait quelque chose battre l’air douloureusement et se fracasser encore plus douloureusement contre son âme, sans jamais identifier clairement ce que c’était. Quelque chose avait changé en lui, mais il ne pouvait pas savoir exactement quoi. Il avait bien sur appris la maîtrise de ses pouvoirs, mais n’avait pas encore réussi à bien juger leur étendue. Une fois, il avait réussi à reculer de six ans, d’avancer de dix, puis seulement d’une et de quelques mois. Avoir le contrôle du temps était le rêve de toute personne. Quand il se lançait à la découverte de ses pouvoirs, il se sentait redevenir un petit enfant qui s’improvise super-héros. Sauf que lui pouvait réellement faire des choses spectaculaires. Il ne faisait pas seulement les imaginer. Du moins, il l’espérait!

Ce jour-là, il était tranquillement couché sur son lit, torse nu, à sommeiller sur ses lectures universitaires, lorsqu’il entendit un vacarme qui le fit sursauter. Au départ, il pensa que c’était quelqu’un qui tentait d’entrer dans l’appartement. Il était déjà prêt à aller le frapper pour l’arrêter et l’empêcher de voler quoi que ce soit. Il se rendit par contre vite compte que le bruit venait en réalité de la chambre voisine, celle de Cedrik. Vu la disposition de l’immeuble et des fenêtres de l’appartement, Malcolm savait que Cedrik ne pouvait pas être réellement en danger. Il devait simplement s’amuser à faire du bruit pour le déranger. Malcolm se mit donc à frapper à grands coups de poings dans le mur adjacent à la chambre du Manners, croyant qu’il comprendrait le message. C’était peine perdue. Malcolm allait sortir de sa chambre lorsque Cedrik termina enfin son chahut. Il se retourna donc vers son lit, s’imaginant déjà dans les bras de Morphée, lorsqu’il entendit un bruit sourd. Comme un corps qui tombe. Comme Cedrik qui tombe. Dans le genre pas normal, il était servi.

Malcolm sortit donc finalement de son antre pour aller voir ce qui arrivait à Cedrik. Quand il le vit par terre, ça avait beau être Cedrik, son instinct de secouriste a repris le dessus avant tout le reste. Il vérifia qu’il respirait toujours et qu’il n’avait rien de cassé avant de le déplacer sur le divan du salon. Il courut ensuite vers la salle de bain pour aller chercher une compresse d’eau froide, qu’il déposa sur le front de Cedrik. Il continua finalement l’inspection du corps du Manners et ne trouva rien de louche ou de grave, outre ses intérieurs de coudes caractéristiques de drogué chronique... Il alla changer la compresse et attendit, à genoux à côté du divan, que Cedrik retrouve assez d’esprit et de force pour parler.


Dernière édition par Malcolm Gillian le Mer 28 Nov - 10:31, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptyJeu 15 Déc - 11:14

Manners avait toujours été dégoûté avant-bras des drogués qui hantaient Tenderloin. Plein de marques laissées par les seringues, parfois couvert de cicatrices plus ou moins nombreuses tenant leur origine en une ou plusieurs tentatives de suicide, souvent bleuis ou teintés de jaunes, ils étaient dignes d’être montrés dans un film d’horreur. Il se disait fréquemment que, s’il ne possédait pas un pouvoir qui guérissait presque automatiquement les blessures mineures causées par les aiguilles, il serait incapable de supporter la vue de ses bras. Il en finirait probablement par se donner une dose mortelle, volontairement, juste pour ne plus avoir à les regarder. Cette idée, bien sûr, lui venait avant celle d’arrêter de planter les aiguilles coupables dans ses veines. Heureusement, son pouvoir magique guérissait l’essentiel. Il atténuait les cicatrices des piqûres et, si Cedrik ne s’en était pas fait régulièrement, elles auraient fini par complètement disparaître.

Comme plusieurs petits junkies dans son genre – mais tellement moins intéressants que lui – Cedrik avait plusieurs manières de consommer. Il variait les substances selon son envie, son besoin. Entre l’ingurgitation de pilules, l’inhalation de vapeurs toxiques et l’empoisonnement par injection, Manners préférait tout de même la dernière solution. Et c’était peut-être pourquoi il continuait de l’employer, même après avoir vu tous ces bras martyrisés par les aiguilles des seringues. La sensation du métal perforant sa peau était presque agréable. Une souffrance piquante et contrôlée. La veine qui savait ce qui s’annonçait et dont le sang lui semblait frémir lui-même d’impatience. C’était plutôt maso, mais c’était vraiment le type de bonheur malsain dont se nourrissait Cedrik Manners.

Le plus malheureux avec ce qui arrivait au petit drogué, ce jour-là, était qu’il n’avait pas conscience d’être abusé par les effets de la substance qu’il s’était injectée. Cette certitude était en partie logique, car jamais auparavant il n’avait connu de telles conséquences à sa consommation. Ses voyages s’étaient toujours faits dans un bien-être parfait. Alors, d’où sortaient ces ombres et ces voix? C’était peut-être la quantité, ou la qualité même, de la drogue qui coulait dans ses veines. Manners n’aurait pas pu le dire et, de toute manière, il n’avait pas conscience de devoir à la drogue les hallucinations cauchemardesques qui commençaient à le prendre. Le savoir l’aurait certainement rassuré. Il aurait eu quelque chose de réaliste, voire normal, à quoi se rattacher. Une explication autre que la folie.

Cedrik avait essayé de fuir les ombres murmurantes en sortant de sa chambre, comme si c’était cette dernière la coupable. Une prison de culpabilité qu’il avait peiné à déverrouiller. Une prison qui, lui semblait-il, lui avait répondu, lorsqu’il avait essayé de l’éventrer pour en sortir. Il avait clairement perçu un bruit de coups. Cela l’avait poussé à sortir encore plus vite. Puis, en partie à cause de son empressement, un manque d’équilibre physique ou mental l’avait projeté au sol, comme une poupée de chiffon jetée par une petite fille ingrate. Le jouet s’était recroquevillé, effrayé par la terrible accusation portée par les ombres. Elles étaient dans le vrai, et c’était ce qui paralysait le plus le jeune homme.

À la fois assommé par la drogue et détaché de la réalité pour la même raison, Cedrik ne réalisa pas tout de suite que Malcolm jouait à la maman avec lui. Heureusement car, sous les effets des substances qui modifiaient sa vision des choses, Cedrik était beaucoup plus enclin à laisser échapper des décharges de rayon laser. Ayant fermé les yeux pour chasser les ombres, assourdi par leur unique voix grésillante et hargneuse, le jeune homme sentit néanmoins qu’on le soulevait. Y avait-il un espoir pour les poupées de chiffon abandonnées? Les yeux fermés aussi fort que s’ils avaient été cousus d’une main experte, Manners essayait d’ignorer les murmures. Mais un meurtrier reste un meurtrier, qu’il l’accepte ou non. Et l’assassin n’en pouvait plus de trembler.

Après d’interminables minutes, qui passèrent comme cent ans pour le drogué, d’un coup, les voix cessèrent. Un répit? Un abandon? Le calme avant la tempête, plus probablement. Cedrik réussit tout de même à ouvrir les yeux. Il ne reconnut pas le plafond de sa chambre. Pas assez sombre. En fait, il faisait trop clair pour qu’il soit dans sa chambre. Il tourna la tête pour établir à quel endroit il se trouvait et il crut que la pièce s’était mise à tourner. Et ce bruit de vent, en sourdine, qui venait de partout et nulle part en même temps. Tout près, un peu trop, un autre genre de monstre ne semblait pas gêné par le vent. N’avait-il pas aperçu les ombres, plus tôt? La compresse glissa un peu sur ses yeux et le jeune homme porta une main à son front, plutôt étonné d’y trouver quelque chose de mouillé. Il lui sembla soudain que la fraicheur de l’objet se transformait en glace qui pénétrait dans sa tête et essayait de transpercer son cerveau. La compresse se retrouva brusquement sur le sol, où elle prit une teinte bleuie qui commença à se répandre tout autour, sur le sol, le tapis devant le sofa, la jambe de Malcolm…


-Gillian, dégage.

Même partiellement inconscient de ce qui lui arrivait, Cedrik sentait que c’était trop anormal pour en parler à l’autre homme. Cependant, il ne voulait pas qu’il lui arrive quelque chose. Il n’avait pas envie de voir sa peau se couvrir de glace, ses yeux se figer dans un regard vide, un peu plus bleu qu’il ne l’était déjà. D’ailleurs, qu’est-ce que cet imbécile faisait juste là, à côté de lui, alors qu’il était évident que ce n’était pas le moment idéal pour l’ennuyer? Peut-être a-t-il envie de voir de près de quoi un meurtrier a l’air. Et voilà les murmures qui faisaient des leurs. Cedrik referma les yeux, mais les murmures ne se turent pas.

-Laissez-moi tranquille…

Il leur avait répondu en murmurant, lui aussi, parce qu’il lui semblait qu’un cri était trop faible, sous ses apparences de brusquerie, pour repousser l’accusation. Pourvu que Malcolm parte. Il semblait que tout était pire s’il restait là à l’observer. Et puis, ce n’était pas comme s’il pouvait comprendre ce qui arrivait à Manners.


Dernière édition par Cedrik Manners le Ven 20 Juil - 16:26, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptyMer 6 Juin - 15:56

Malcolm avait désormais une hargne dure pour tous les drogués qu’il croisait. Depuis qu’il s’en était sorti, il éprouvait une grande rage lorsqu’il apprenait que quelqu’un se laissait ronger par ces cochonneries. Il savait pertinemment tout ce que la drogue pouvait amener comme avantages. Il comprenait que c’était difficile de se séparer de la seule chose au monde qui nous faisait nous sentir bien, vivant, nous-mêmes. Il l’avait expérimenté tellement souvent. Il ne l’avouerait probablement jamais, mais la raison pour laquelle il était aussi fâché restait peut-être de la simple jalousie. Malcolm était jaloux de ceux qui avaient encore des épisodes de bonheur pur et simple. Jaloux de ceux qui réussissaient à se sentir vivant, réel. Jaloux de ceux qui parvenaient à se reconnecter avec ce qu’ils étaient vraiment, sans masque, sans décorations, sans gêne. Juste eux et leur bonheur. Grâce à des substances chimiques, oui, mais c’était tout de même la beauté d’une personne, d’un moment et d’une émotion pures. Malcolm ne connaissait plus ces moments, lui.

Mais heureusement, il savait aussi tous les désavantages de la drogue et c’était principalement pour ces raisons qu’il avait arrêté, mais surtout parce qu’il commençait à perdre le contrôle et que Malcolm n’aimait pas que quelque chose d’autre contrôle sa vie. C’est aussi pour cette raison qu’il détestait de plus en plus ses parents. Surtout son père. Ils étaient toujours là à surveiller ses moindres faits et gestes, ses déplacements, ses fréquentations, ses notes de cours, ses résultats scolaires, son alimentation, son entraînement… La seule chose qu’ils ne surveillaient pas était ses dépenses et c’était tant mieux ainsi. Ce n’est pas pour rien que le Gillian se devait d’être parfaits. Ses parents n’auraient pas toléré le moindre écart de conduite. Ils avaient eu tellement peur de le perdre leur fils quand il était tombé dans la drogue, que maintenant ils ne le lâchaient plus. Et ils avaient tellement bien fait comprendre à Malcolm la honte et le déshonneur qu’il avait apporté à leur famille que celui-ci ne voulait pas causer plus d’ennuis. Il suivait donc à la lettre ce que ses parents lui demandaient, sans pour autant être d’accord avec eux et ne rien regretter… Ses parents étaient partout, tout le temps. Malcolm ne pouvait pas les fuir. Ils le rendaient fou, ils l’étouffaient! Souvent, il avait pensé à ne prendre qu’une seule petite pilule pour oublier tout ça… Mais rapidement il se rendait à l’évidence qu’une seule pilule ne suffirait plus désormais.

Étrangement, le fait d’être là, à regarder Cedrik, complètement défoncé, être dans les vapes ne dérangeait pas tant que ça Malcolm. Il y avait quelque chose, en ce moment, qui intriguait particulièrement le Gillian. Il ne l’avait jamais remarqué avant, mais Cedrik était particulièrement fragile. En examinant son corps pour être certain qu’il ne se soit pas blessé en tombant, il avait pris conscience de la maigreur et de la petitesse de son colocataire. Évidemment, il avait remarquer à l’œil nu qu’il était beaucoup plus menu que les autres, et toutes les fois ou leurs corps s’étaient retrouvés l’un par-dessus l’autre dans un de leurs combats, Malcolm avait aussi remarqué qu’il pouvait un peu trop sentir les côtes de Cedrik, mais il ne s’était tout de même jamais arrêté à ces faits. Mais dans le moment présent, alors que tout ce qu’il lui importait était que son colocataire soit correct, il ne faisait que l’examiner et le fixer. Il guettait les moindres signes de changement dans son activité cérébrale ou respiratoire, question de pouvoir agir rapidement. Il avait son cellulaire juste à côté, pour appeler des secours au besoin. Il ne savait pas exactement ce qui était arrivé à Cedrik, mais était tout de même assez logique et expérimenté pour savoir reconnaitre les veines et les yeux d’une personne sur un gros buzz. Bien que tout ça le dégoutait et le rendait dans tous ces états, il s’était promis de rester à ses côtés coute que coute. Il ne laisserait pas Cedrik tomber. Pas lui. Pas un de plus.

Perdu dans ses souvenirs et occupé à fixer sa poitrine, Malcolm sursauta quand Cedrik lança la débarbouillette plus loin. Au moins, il était réveillé, il pourrait lui parler et lui expliquer. Malcolm pourrait alors comprendre et l’aider du mieux qu’il le pouvait.


-Gillian, dégage.
-Non.


Malcolm repris le pouls de Manners et son propre cœur s’emballa aussi, sous l’effet de la peur et de la surprise. Inconsciemment, il laissa sa main sur celle de Cedrik. Réfléchissant uniquement à ce qu’il venait de réaliser. Le cœur de Manners battait tellement vite que c’était impressionnant, mais inquiétant. Cedrik devait se calmer, sinon le pire pourrait arriver. Malcolm devait se concentrer pour se convaincre que ça n’arriverait pas, qu’il allait l’aider à temps et que tout se passerait bien.

-Laissez-moi tranquille…

Visiblement seul dans la pièce, Malcolm comprit tout de suite que ce n’était pas seulement un gros buzz, mais plutôt un bad trip que Cedrik vivait. Malcolm en avait fait plusieurs et savait pertinemment à quel point les voix et les hallucinations pouvaient rapidement devenir insidieuses… Il devait se forcer à parler à Cedrik et à se rappeler toutes ces fois ou il était à la place de Cedrik et qu’un ami était à la sienne. Il n’aimait pas ça du tout, mais se devait de le faire, pour Cedrik et sa propre conscience.

-Qui doit te laisser tranquille? MANNERS! Qui est là?

Il avait parlé d’une voix autoritaire, pour que Cedrik sorte de son état presque léthargique, mais aussi pour qu'il comprenne qu’il ne pourrait pas le faire taire ni le faire s’en aller. Malcolm était déterminé à l’aider et Cedrik ne pourrait rien faire pour le faire changer d’idée.
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MessageSujet: Re: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptyVen 20 Juil - 16:51

[Tu deviens presque attachant.]

Manners n’avait rien d’autre que l’école et la drogue. La dépendance à la réussite et celle des poisons. S’il avait lui-même choisi de s’isoler, il n’en était pas moins seul. Se consoler en se disant que, loin de tous, il évitait de contaminer des gens n’était pas suffisant. La souffrance, l’épuisement, la trahison ou même la mort pouvaient être un prix juste pour sauver des vies. La solitude aussi, certainement, mais elle restait toujours assez intolérable. Elle était plus passive, toujours présente, glacée, enroulée autour du cou comme une écharpe de barbelé. Et il fallait choisir de la porter à tous les jours. Ne laisser personne essayer de l’enlever. Se battre pour la conserver. La porter fièrement, sans jamais baisser la tête, sans jamais baisser sa garde. Cedrik s’accrochait à l’école et la drogue pour moins sentir le métal lui lacérer la gorge.

Ce jour-là, la drogue l’abandonnait. Elle qui lui faisait toujours tant de bien, elle se retournait contre lui. Jouait avec son esprit, ses perceptions, sa raison. Tout était vrai et tout était faux. Elle aurait pu le tuer et la trahison aurait été moindre. N’était-ce pas ce que Manners cherchait chaque fois qu’il plantait l’aiguille dans son bras? La mort la plus douce à ses yeux. Un accident volontaire, une toute petite dose de trop, juste ce qu’il fallait pour que plus rien n’existe que les effets agréables de la drogue. Sa définition du dernier voyage. Oh, il ne fallait pas penser que le jeune drogué était du type suicidaire. Il aimait survivre. Il ne pouvait simplement pas s’empêcher de toucher le risque, de passer à un fil de l’irréparable, à chaque fois qu’il le pouvait.

C’était probablement ce qui lui plaisait le plus avec Gillian. Le risque permanent. La possibilité de libérer la bête, d’ouvrir sa cage de contrôle excessif avec les bonnes clés, les bons mots. Savoir qu’elle se jetterait sur lui comme sur une proie, pour le déchiqueter, le briser, le détruire. Devoir se défendre, avec ses maigres moyens, le temps que le jeu devienne moins amusant, pour finalement trouver un moyen de renvoyer la bête en tôle. Recommencer à respirer, une fois caché dans sa chambre, la porte fermée et verrouillée. Il n’y avait rien comme le danger pour se souvenir qu’on était vivant.

Cedrik avait l’habitude de n’avoir rien à faire de personne. Il lui arrivait, très rarement, mais tout de même, de se défoncer tranquillement au fond d’une ruelle. Que quelqu’un regarde ou non, il s’en moquait. Qu’une personne soit choquée, blessée ou ait pitié de lui, il s’en balançait. Les autres n’existaient pas. Ils n’avaient qu’à fermer les yeux ou à regarder ailleurs. Seulement, ce soir-là, devant cet imbécile de Gillian, ce n’était pas la même chose. Manners détestait quand l’autre homme se montrait concerné, à la limite de la gentillesse. Ça lui jouait sur les nerfs. C’était la pire des agressions. Il préférait de loin les coups. La mère de Cedrik était morte et il n’en voulait pas une deuxième, surtout si elle était déguisée en M. Muscle. Si Malcolm avait besoin de laisser aller ses pulsions maternelles, il n’avait qu’à se trouver un petit frère, un chien ou une peluche. Manners, lui, n’avait pas envie de jouer à ça. C’est pourquoi il retira brusquement son bras lorsque la main du colosse, qui dégageait une chaleur insupportable, s’y posa.


-Tu me lâches, Gillian. J’ai pas du tout envie d’être ta poupée ce soir.

Il n’avait qu’à lui en balancer une sur la gueule s’il n’était pas content. Ce serait déjà un moyen de détourner l’esprit de Cedrik des murmures qui n’arrêtaient plus de lui répéter son atrocité.

La glace bleutée s’étendait maintenant jusqu’au mur. Elle commençait à monter, lentement. Gillian avait les deux jambes prises dans des blocs transparents et épais. Il ne semblait même pas le remarquer. Peut-être n’était-il pas vraiment là. Peut-être n’existait-il même pas. N’avait jamais existé.


-Qui doit te laisser tranquille? MANNERS! Qui est là?

Le drogué posa ses yeux noirs sur le visage de celui qui venait de s’adresser à lui. Il semblait drôlement paniqué, finalement. Peut-être qu’il avait remarqué la glace, même s’il ne la regardait pas et ne bougeait pas pour en sortir. Quelque chose clochait néanmoins dans ce qui se passait, mais Manners n’arrivait pas à comprendre quoi.

-Toi. Toi, tu dois me laisser…tranquille.

Dur de faire une phrase complète au milieu de tous les murmures. Cedrik ferma les yeux une seconde. Il voulait que Malcolm parte. Pourquoi n’entendait-il pas la voix multiple, lui? Pourquoi ne comprenait-il pas que rester là était courir à sa mort? Une mort lente et insidieuse.

-Vas-t-en, Gillian. J’suis sûr que t’es assez fort…Vas-t-en et je te tuerai pas…

C’était quoi, au fond, un peu de glace contre une montagne de muscles comme lui?
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MessageSujet: Re: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptyDim 21 Oct - 23:15

Malcolm était agenouillé aux côtés d’une des personnes qu’il détestait le plus, dans le seul but de lui venir en aide. Il avait peur pour lui, peur qu’il ne revienne pas complètement de ce voyage, ou même pas du tout. Concerné par le pouls de son colocataire, mais aussi par son état mental, le Gillian serrait la main de l’autre jeune homme, dans l’espoir que ce soit assez pour le faire s’en sortir indemne. Malcolm ne savait pas trop pourquoi il voulait tant que ça protéger Cedrik. Et, alors qu’il commençait à se dire qu’il devrait peut-être faire comme Manners lui demandait et s’éloigner, Malcolm se rappelait de son ami Marc. Il serrait alors plus fort les doigts de Cedrik, pour s’assurer qu’il ne lui arriverait pas la même chose.

Malcolm se concentra sur le pouls de Cedrik. Son cœur battait si fort qu’il pouvait presque en sentir les répercussions jusque dans le bout de ses doigts. Ou du moins, il en avait l’impression. Il essayait de trouver un moyen de le calmer et si dit que s’il clamait sa propre respiration et son propre cœur, cela pourrait peut-être, par procuration, aider Manners à descendre de son nuage invisible noir. Pour ce faire, il se concentra sur le positif de ce qui leur arrivait. C’était difficile à trouver, mais il finit par se dire que c’était plutôt agréable de sentir la chaleur du corps de Cedrik dans sa main. Ou alors c’était la sienne? Peu importe, il se devait de ne penser qu’à cette onde positive. Le contact de leurs mains faisait une drôle de sensation à Malcolm, pas juste parce que leurs peaux étaient en contact tellement étroit que c’était devenu tout humide et inconfortable, mais parce qu’il ressentait comme un drôle de picotement qui partait de la paume de sa main et qui montait jusqu’à son cou. C’était un peu comme si le venin dans le sang de Cedrik avait réussi à se transmettre à Malcolm et qu’il faisait lentement son chemin vers son cerveau. Il allait fermer les yeux pour mieux savourer cette sensation et ainsi mieux la décoder, lorsque Cedrik se dégagea brusquement de sa prise.


-Tu me lâches, Gillian. J’ai pas du tout envie d’être ta poupée ce soir.
-Ça ne te déranges pas d’habitude…


Il avait murmuré, pour ne pas plus provoquer Cedrik. D’habitude il aimait bien ce petit jeu, mais la sécurité du Manners passait avant ses crises de diva qui voulait s’amuser à ses dépends. Malcolm comprenait parfaitement ce qui arrivait à Cedrik. Il avait l’impression d’être superpuissant et de pouvoir tout contrôler ce qui lui arrivait et ne voulait donc pas avoir l’air d’un faible qui avait besoin qu’on le couvre. Grâce à son recul et à son expérience personnelle, Malcolm savait pertinemment que Cedrik se trompait. Surtout qu’il ne devait même pas se rendre compte que son cœur battait si vite et que c’était si dangereux. Malcolm savait aussi très bien que les bad trips qu’il avait fait et qui s’étaient bien finis l’avait fait grâce à des amis qui étaient là pour l’aider à reprendre le contrôle. D’accord, lui et Cedrik n’étaient pas exactement dans les mêmes termes, mais la présence de Malcolm allait surement être mieux que rien du tout.

Malcolm eut froid dans le dos lorsque Cedrik leva son regard vers lui. Mais réellement, le frisson glacé parcourut son échine pour se terminer à ses pieds, qui lui semblaient plus froids qu’à l’habitude. Tout comme l’air ambiant. Malcolm n’osait pas trop respirer fort, de peur de voir sa respiration se condenser devant lui. Il y avait en plus quelque chose d’inquiétant dans sa manière de le regarder. Comme si un gros monstre allait lui foncer dessus pour le dévorer. Mais un monstre invisible, que Cedrik croyait réel, à un point tel que même ses yeux voulaient le dire à Malcolm. Mais peut importait le type de monstre que Malcolm devrait affronter, il resterait aux côtés de Cedrik.


-Toi. Toi, tu dois me laisser…tranquille.
-Pfff… classique!


Malgré les paroles de Cedrik, Malcolm resta assis à ses côtés. Il ne remit pas sa main dans la sienne, mais lui flattait doucement les cheveux. Il ne savait pas trop pourquoi il le faisait, mais il lui semblait presque que son mouvement aidait les idées noires et inquiétantes de Cedrik à sortir de sa tête. Peut-être ce n’était pas le cas non plus, mais il lui semblait…

-Vas-t-en, Gillian. J’suis sûr que t’es assez fort…Vas-t-en et je te tuerai pas…
-J’ai pas peur que tu me tues, alors j’ai encore moins l’intention de te laisser tout seul comme ça. Et dis-moi, princesse, je suis assez fort pour quoi?


Malcolm commençait à avoir les jambes ankylosées, force d’être assis sur ses pieds et de ne pouvoir bouger. Il ne laissa donc pas vraiment le temps à Cedrik de lui répondre et décida de se lever et d’aller conduire Cedrik dans un endroit plus calme, plus intime. Il n’opta donc pas pour le salon, puisque si les autres colocataires arrivaient, ils allaient tous voir Cedrik dans ce sale état et Malcolm ne le voulait pas. Il fallait donc qu’il l’amène dans une de leur chambre. Malcolm se dit que comme Cedrik sortait de sa chambre parce qu’il ne s’y sentait plus bien, valait mieux le conduire dans une chambre neutre. La sienne. En plus, sa propre chambre était plus proche. Tout en se levant, il avait mis le bras de Cedrik autour de son cou et lui prit les jambes sous les genoux, pour le porter jusque sur son lit. Une fois Cedrik bien étendu sur son lit, Malcolm alla barrer la porte, puis pris une couverture supplémentaire dans son garde-robe et la mit sur Cedrik. UIl s’assit finalement lui-même sur son lit à la droite de Cedrik, environ à la hauteur de ses hanches et lui prit sa main.

-T’es en sécurité ici, avec moi…

Il espèrait que ses mots allaient suffire à faire taire les démons imaginaires de Cedrik.


Dernière édition par Malcolm Gillian le Mer 28 Nov - 10:31, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptySam 24 Nov - 20:34

Manners n’avait jamais connu ses parents biologiques. Il n’avait aucun visage auquel ramener les traits du sien. Il ne pouvait pas dire qu’il avait la carrure de son père ou les mains de sa mère, Il n’avait aucune idée de la couleur de leurs cheveux ou de leurs yeux. Tenait-il ses iris presque noirs de son père ou de sa mère? C’était comme s’il était arrivé de nulle part. Un accident de l’univers. Un hasard biologique. Une erreur. Il n’avait aucune cause. Il n’était né de rien, de personne. Il était son propre point de départ. Ses parents adoptifs ne lui avaient jamais raconté les circonstances de sa mise en adoption. L’histoire du bébé survivant au milieu des décombres où gisaient les cadavres carbonisés de ses parents lui était encore totalement inconnue. On lui avait seulement dit qu’il avait été adopté et qu’on n’avait pas cherché à en savoir plus sur ce cadeau du ciel. Manners s’était donc quelquefois demandé s’il avait été abandonné à la naissance.

Peut-être que ceux qui partageaient son sang avaient vu en lui ce que lui-même devinait, ce danger qu’il représentait pour les autres. Sa mère avait peut-être été celle des deux qui n’avait pas voulu assassiner son enfant, parce qu’elle ressentait pour lui cet amour illogique et inexplicable que les mères ont pour ceux qu’elles mettent au monde, même lorsqu’ils s’avèrent être les pires monstres. Et son père, plus logique mais tout de même sensible, avait accepté de garder la dangereuse aberration en vie, à condition d’éloigner le danger qu’elle représentait de la femme qu’il aimait. C’était probablement lui qui était allé donner l’enfant, reportant sur une autre famille la malédiction que sa bien-aimée et lui avaient mis au jour… C’était là l’une des nombreuses théories imaginées par Cedrik. Il avait eu bien le temps d’y réfléchir depuis qu’on lui avait annoncé qu’il avait été adopté. Une autre de celles-ci était que ses parents adoptifs étaient décédés à cause de lui. Cette hypothèse se déclinait en plusieurs histoires différentes, des dizaines de scénarios meurtriers dont le jeune Manners se trouvait être le point central.

La mort de sa mère ainsi que celle de sa sœur avaient profondément bouleversé Cedrik. Qu’il n’ait aucun lien de sang avec elles ne comptait pas, tout comme avec son père adoptif. Ils étaient sa famille. Ils l’avaient été dès son arrivée et ils n’avaient jamais cessé d’être ceux à qui il appartenait, malgré les différences souvent visibles qu’il affichait par rapport à eux. Jamais il n’avait vécu de crise existentielle où il questionnait la légitimité du rôle de sa famille. Bien sûr, tout n’avait pas toujours été rose. Ils avaient traversé des hauts et des bas, comme toute famille, mais les Manners étaient unis, et Cedrik se considérait toujours comme une partie de ce tout, même empoisonné par la culpabilité de la mort de sa mère et de celle de sa sœur ainsi que par l’abandon de son père. Il n’avait jamais rêvé d’être cajolé par ses parents biologiques, même si l’idée de les rencontrer pour mieux se comprendre lui avait toujours semblé intéressante. D’ailleurs, il ne voulait plus de tendresse désormais. De personne. Il avait tué la douceur, la beauté, l’aurore. Il avait détruit l’amour inconditionnel et l’admiration. Et il avait rejeté l’amour fort et silencieux, l’affection tendre mais brute, les regards qui remplacent la voix. Cedrik Manners avait grandi dans une sorte de rêve, mais la solitude l’avait réveillé et projeté dans une réalité désolante qui devait être effacée à coups d’illusions, de faux songes. Et, même s’il était devenu grand, il se sentait aussi minuscule qu’un éclat de verre.

Ce soir-là, dans la noirceur des effets de la drogue, Cedrik se laissait couler dans la culpabilité. Il semblait lutter contre les vagues, mais elles le submergeaient sans difficulté. Déguisés en ombres menaçantes, les remords du jeune murmuraient leur propre nom. Ils devaient cette voix qui était la leur aux effets du poison ingurgité par leur victime. Habituellement, seul le silence témoignait de leur existence. Ils amenaient le froid de novembre, la glace traitresse sans la neige pure. La terre gelée où on enfermait les morts.

Manners faisait une overdose. Cliniquement, il était presque étonnant qu’il n’en ait jamais fait auparavant. Aux quantités incroyables de dope qu’il s’envoyait, il aurait du crever comme une larve défoncée au fond d’une ruelle il y avait bien longtemps. Mais il y avait cet étrange pouvoir que son corps possédait, cette faculté à résister aux maladies, aux poisons et aux blessures. Peut-être le jeune homme avait-il atteint la limite, ce soir-là, en voulant s’engourdir un peu trop.

Cedrik sentait vaguement quelque chose dans ses cheveux, mais les murmures prenaient presque toute son attention.


-J’ai pas peur que tu me tues, alors j’ai encore moins l’intention de te laisser tout seul comme ça. Et dis-moi, princesse, je suis assez fort pour quoi?

La voix de Malcolm se mélangea aux murmures et, comme ceux-ci, Manners essaya de l’étouffer dans sa tête. Il rouvrit les yeux brusquement lorsqu’il sentit l’autre homme le bouger. Trop dans les vapes pour contrôler pleinement son corps et, surtout, n’ayant aucune chance de dominer physiquement Gillian, il se contenta de rechigner faiblement.

-Gillian, tu me lâches.

Tu sais combien il fait froid, sous la terre, en novembre? Et pourtant, elles dorment là, toutes les deux. À jamais enveloppées dans la terre de la fin de l’automne, un sol qu’aucun été ne pourra jamais réchauffer. C’est bien pire que l’enfer, non? Et c’est ta faute.

Un déclic se fit entendre et Cedrik essaya de se concentrer sur ce qui se passait autour de lui pour essayer d’ignorer les murmures. Il sentit la couverture qui l’écrasait mais, pire, il sentit la brûlure sur sa main. Gillian la transperçait, la broyait, la déchiquetait. Il attrapait le cancer en touchant sa main. Manners la retira brusquement en comprenant ce qui se passait.


-T’es en sécurité ici, avec moi…

Mais pas lui. Lui, il crève lentement en essayant de t’aider.

-Oh mais Gillian, tu comprends pas qu’il faut que tu me foutes la paix? Laisse-moi crever tranquille! Tu les entends pas, les voix? Tu saisis pas ce qu’elles te disent? DÉGAGE AVANT QUE JE TE TUE!

Il avait détourné le regard, mais ses iris étaient complètement noirs, et ils avaient eu une inquiétante lueur bleu électrique.
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MessageSujet: Re: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptyMer 28 Nov - 10:30

[J't'aime assez toi là!!!]

Malcolm avait eu la chance de grandir dans une famille normale, avec deux parents et une sœur pas trop jeune de lui. Il avait aussi eu la chance de s’entendre super bien avec ladite sœur, qui le comprenait et l’appuyait dans tout ce qu’il faisait. Elle était la petite sœur modèle et classique en fait, celle qui croit que son grand frère est parfait et se compare à un super-héros à force d’être génial. Il avait également eu la chance d’avoir beaucoup d’amis, à une certaine époque. Très bien entouré, tant que la drogue les problèmes ne se pointaient pas le bout du nez, Malcolm avait eu un grand cercle d’amis. Des gens avec qui il pouvait rire, être sérieux, se confier et faire ce qu’il voulait, sans pression. Malgré tout ça, malgré qu’il ait eu tant de chances et de privilèges personnels, ça ne compensait pas vraiment pour les parents qu’il avait eus. Les gens disaient souvent qu’on ne choisit pas notre famille, Malcolm était probablement la personne pour qui ce dicton avait été inventé. Ses parents étaient typiquement américains : assoiffés de pouvoir et d’Argent, toujours bien mis, obsédés par la perfection et prêts à tout pour humilier leurs rivaux, mais surtout des adeptes d’abaisser les autres pour mieux se remonter. Malcolm, lui avait toujours trouvé ce mode de vie pathétique. Il se contentait généralement de ce qu’il avait. Il n’avait pas besoin des mêmes choses que ses parents. Il ne pensait pas les mêmes choses que ses parents. Il croyait qu’on travaillait pour être heureux, qu’on devait mériter notre morceau de soleil et que sinon on s’arrangeait pour en bricoler un à notre gout. Malcolm s’appropriait donc des choses et en faisait un mélange harmonieux pour réussir à se créer son bout de paradis. Ses parents et lui n’avaient rien en commun et ceux-ci ne le laissaient pas vivre comme il l’entendait. Depuis qu’il était tout jeune, ses parents avaient essayé de le faire entrer dans un moule, pour finalement l’y enfermer pendant sa cure de désintox… Résultat : Malcolm Gillian jouait le rôle que ses parents voulaient qu’il interprète à la perfection désormais et avait une carapace aussi solide que les murs d’un bunker nucléaire. Il en avait presque oublié ses propres rêves.

Parfois, il se disait qu’il aurait préféré être orphelin. Puis, il se disait que les orphelins auraient surement voulu d’une famille comme la sienne. C’était un peu le paradoxe des femmes et de leurs cheveux… les brunes qui veulent être blondes et les blondes qui veulent être brunes; les frisées qui veulent être droites et les droites qui veulent être frisées... mais avec une famille. Si ses parents venaient à mourir dans un accident de la route, Malcolm ne croit pas qu’il pleurerait. Au contraire, il s’effondrerait de rire et les larmes qui rouleraient sur ses joues ne seraient pas mordantes de froid et de glace, mais lui ferait mal à force de chaleur et de bonheur. Le soulagement serait tellement puissant qu’il ferait fondre son armure et c’est ce trop plein d’eau accumulée dans son corps qui sortirait, plutôt que des larmes de tristesse. Mais ses parents ne mourraient pas dans un accident de voiture, parce qu’ils roulaient généralement avec un chauffeur très expérimenté et prudent ou alors ils étaient dans un jet privé. Les chances étaient nulles. Malcolm allait être condamné à se laisser lentement mourir par le froid de son âme qui s’installait de plus en plus en lui… Il était convaincu que lors de l’autopsie les médecins allaient trouver sa température interne anormalement basse et n’allaient rien comprendre. Si ça se trouve, il allait devenir un excellent cas d’analyse… Au moins, il finirait par servir à quelque chose…

Quant Cedrik retira avec force sa main de celle de Malcolm, celui-ci eut l’impression que Cedrik venait de lui arracher une partie de la peau de sa paume de main. La froideur qui prenait la place de la chaleur de la main de Cedrik était comme un millier d’aiguilles qu’on entrait dans la peau de Malcolm. Celui-ci passa quelques secondes à fixer intensément sa main, pour s’assurer qu’il avait encore toute sa peau et qu’aucune aiguille n’y était enfoncée. Bien qu’il ne voie rien d’anormal, il sentait toujours cette sensation désagréable.


-Oh mais Gillian, tu comprends pas qu’il faut que tu me foutes la paix? Laisse-moi crever tranquille!

Malcolm reporta concrètement son attention sur Cedrik, il eut presque peur. Ses yeux étaient noirs aux reflets bleutés, presque toujours fermés, mais semblaient un peu morts lorsqu’ils étaient ouverts. Un peu trop comme ceux de Marl… Comme si le cerveau de Cedrik n’arrivait plus à reprendre le contrôle et que tout s’emballait chez lui. À l’image de son rythme cardiaque, tout déraillait, tout menaçait de se détruire d’ici quelques temps. Un peu comme dans le jeu auquel Malcolm jouait ces temps-ci sur sa console XBOX 360. Il se retourna pour regarder la pochette, parce que le nom lui échappait... Ah oui, voilà! Le jeu d’Alice; Retour au Pays de la Folie. Malcolm soupçonnait Cedrik d’être dans le même genre d’univers sombre et glauque. Le genre d’univers qu’il foutrait un frisson glacial dans le dos de la plus chaude des flammes. Le genre d’univers qui te fait te demander à chaque pas de plus ce que tu fous là, comment tu y est arrivé et pourquoi tu continue d’avancer. Cedrik devait voir des bouts de murs s’effriter, une substance étrange noire et épaisse flotter dans l’air, des particules de sang et de chair l’entourer, des objets prendre vie et voir des ennemis partout…

-NON! Je te laisserai pas! Et… tu ne crèveras pas, Manners!!!

Malcolm avait parlé fort et un peu bête. Il se disait que Cedrik avait peut-être de la difficulté à l’entendre, avec toutes les autres choses qui se passaient dans sa tête et qu’il n’avait pas compris ce qu’il lui avait dit, alors c’est pour ça qu’il l’avait fait répéter. Malcolm s’arrangerait pour ne plus avoir à répéter. Tout serait très clair. Et il n’avait pas peur de Cedrik et de ses lasers. Au pire, il remonterait le temps…

-Tu les entends pas, les voix? Tu saisis pas ce qu’elles te disent? DÉGAGE AVANT QUE JE TE TUE!

Cedrik avait détourné le regard de Malcolm. Malcolm se leva, pour aller s’asseoir plus haut sur le lit et ainsi être environ à la moitié de son torse sur le lit. Malcolm se pencha sur Cedrik et prit son visage entre ses mains, pour le forcer à le regarder. La proximité de leurs corps aurait pu mettre Malcolm mal-à-l’aise dans un autre contexte, mais comme il était conscient que c’était en fait une question de vie ou de mort, il mit un peu ses réserves de côté. Ainsi, avec le visage tout près de celui de Cedrik et son torse contre le sien, Malcolm parla à Cedrik d’un ton qui faisait comprendre qu’il ne changerait pas d’avis et que Cedrik ferait mieux de lui répondre adéquatement.

-Non! Non, je ne les entends pas les voix! Parce que les voix, elles sont dans ta tête! Tu as trop pris de cochonnerie et là tu délires! Donc, je sais pas ce qu’elles te disent, mais de toute façon ça doit être complètement faux et ridicule! Elles essaient de gagner sur toi, mais ça ne marcheras pas. Je sais que tu ne me tueras pas! Arrête avec ça! Je suis là pour t’aider! Là va falloir que tu te concentres sur autre chose et que tu les laisses pas gagner… COMPRIS?
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MessageSujet: Re: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptySam 12 Jan - 0:59

Tu sais combien il fait froid, sous la terre, en novembre? Tu sais combien il fait froid, dans un cercueil? Un cercueil lisse, couvert de minuscules éraflures faites lorsqu’il a été enseveli sous des couches et des couches d’oubli. As-tu seulement idée de comment on peut se sentir lorsque l’air ne passe plus à travers la terre? À travers la glace? On suffoque, on étouffe, on pleure sans larmes, on crie sans bruit, on bouge tout en restant immobile, on se débat dans la torpeur, dans la prison d’un corps dont le cœur ne bat plus. On souffre comme il n’est pas humainement possible de le comprendre.

LES MORTS NE SOUFFRENT PAS.

Manners secoua la tête et gémit. Foutues voix. Il ne savait plus qui avait raison entre elles et lui. Après tout, que connaissait-il de la mort? Peut-être que les voix l’avaient vue en face, ou peut-être étaient-elles simplement détentrices d’une vérité inaccessible aux pauvres mortels comme lui. Pourtant, ces voix n’étaient rien. Elles n’avaient jamais été là avant. Avant quoi? À ce moment précis, il ne pouvait pas le dire. Il eut même, l’espace d’une seconde, l’impression qu’elles pouvaient être dues à la drogue qu’il avait prise. Seulement, il replongea très rapidement dans leur mélodie grinçante.

Un long cheveu. Très fin et très doux. Un cheveu d’ange. Un autre. Un autre. Encore un autre. Des milliers de cheveux qui tombent, que le vent emporte. Une petite tête nue avec de grands yeux fatigués. Les yeux clignent. Se ferment. Ne s’ouvrent plus jamais.

Les voix lui murmuraient des mots, des phrases, mais aussi des images. Il les sentait plus qu’il ne les voyait, avec tout ce qu’elles portaient de malheur et de silence. Aucun mot ne pouvait soutenir la gravité de la mort. Même les images ne suffisaient pas à recréer l’atrocité de cette réalité pourtant presque banale tellement elle était répandue. Il revoyait sa sœur et sa mère, au sommet de la maladie, et leurs deux souvenirs ne formaient qu’une seule horreur distordue. Un seul visage pale, sans sourcils, au sourire tremblotant. Un seul corps affaibli, allongé dans un lit aux draps semblables à un linceul. Deux peines unies en une seule douleur explosée en morceaux.

Il crut entendre une voix plus forte, plus profonde et plus grave, comme en sourdine, très loin, mais il ne comprit pas ce qu’elle pouvait bien vouloir lui dire. Il se souvint vaguement que cet imbécile de Gillian le harcelait, quelques instants – ou quelques heures? – plus tôt, mais une image beaucoup plus forte que l’idée que la montagne de muscles pouvait être en train de s’impatienter commença à faire surface.

Ce connard de Gillian ne semblait vraiment pas comprendre. Voilà qu’il le dorlotait comme s’il était victime d’un quelconque accident. Il n’y avait pas eu d’accident; il y avait eu deux meurtres. Et Manners ne savait pas comment faire entrer cette notion dans la conscience de l’autre homme. Peut-être que s’il se taisait un peu et le laissait écouter les voix…

C’est novembre, Cedrik. Ça ne te rappelle rien? Novembre est le mois où on enterre les cadavres dévorés par le cancer. Tu pensais en avoir terminé? On dirait que tu as oublié une tâche que tu avais commencée, une mort entamée mais jamais achevée. La rémission n’a toujours été qu’un terme mieux brossé pour parler de sursis. Tu croyais que tu avais pu le sauver en t’éloignant de lui avant qu’un cercueil ne se referme sur son pauvre corps? Quelle naïveté désolante. Tu lui as offert un peu de temps, bien sûr, mais tu as surtout contribué à sa mort solitaire et pathétique. Lorsque tu es parti, il était déjà irrémédiablement contaminé. Novembre sonne, Cedrik, et les morts s’accumulent.

Alors que cette idée prenait toute la place dans son esprit, Cedrik ne remarquait pas que sa respiration, extrêmement rapide quelques secondes plus tôt, devenait de plus en plus lente. Il avait froid, mais ce devait être la faute de la glace de novembre, celle qui emprisonnait la mort parmi les humains et qui recouvrait tous les souvenirs.

Une chaleur. Quelque part sur son corps, une source de chaleur le gardait éveillé. Il se força à la localiser, car se concentrer sur celle-ci lui faisait un peu oublier les voix. Il lui semblait qu’elle recouvrait son torse – en l’écrasant un peu – et qu’elle allait même jusqu’à son visage.


-Non! Non, je ne les entends pas les voix! Parce que les voix, elles sont dans ta tête!

La voix de Gillian. Il s’y raccrocha pour essayer de n’entendre que celle-là. Pour la première fois, et probablement la dernière, Malcolm Gillian était ce qu’il y avait de plus positif pour lui.

-Tu as trop pris de cochonnerie et là tu délires!

Il n’avait peut-être pas tort, mais il ne savait rien du passé de Manners. S’il avait connu la vérité, peut-être aurait-il refusé d’essayer de l’aider. D’ailleurs, pourquoi prenait-il soin de lui, à ce moment-là? Il n’avait aucune raison de le faire.

- Donc, je sais pas ce qu’elles te disent, mais de toute façon ça doit être complètement faux et ridicule!

-Non, elles disent vrai, Gillian.

Sa voix n’était qu’un mince filet aux tressautements un peu acides, et c’était ce dernier point qui permettait de bien la reconnaître.

-Elles essaient de gagner sur toi, mais ça ne marcheras pas. Je sais que tu ne me tueras pas! Arrête avec ça! Je suis là pour t’aider! Là va falloir que tu te concentres sur autre chose et que tu les laisses pas gagner… COMPRIS?

Un rictus qui pouvait ressembler à un sourire se dessina sur le visage du jeune toxicomane. Il planta à nouveau son regard noir dans les yeux de Malcolm, mais les étincelles bleues avaient disparu.

-T’es presque amusant, Gillian. Tu parles…tu parles…et tu connais rien. T’es pas invincible…et j’en ai tué d’autres avant toi.

Cedrik inspira profondément, car parler, même d’une voix très basse, lui avait demandé un grand effort.

-D’ailleurs, pourquoi tu m’aides?

Deux grands yeux sans cils. Un rayon de soleil qui les effleure. Dis Cedrik, la mort, tu penses que c’est froid?
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MessageSujet: Re: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptyJeu 24 Jan - 10:16

Si près de Cedrik, Malcolm essayait de seulement se concentrer sur ses yeux. Des yeux d’un vert si foncé en ce moment qu’ils avaient l’air noirs. La drogue les rendait encore plus sombres, immenses et vitreux. Cedrik avait les yeux de quelqu’un qui était complètement perdu, doseuvré. Ses yeux lançaient un appel de détresse à quiconque osait les regarder. Malcolm ne pouvait y être indifférent. Cedrik avait l’air d’en avoir assez. Il semblait au bout du rouleau. Ses yeux étaient ceux de quelqu’un en détresse, sur le bord de l’agonie. Malcolm savait les reconnaître, parce qu’il les avait trop souvent vus. Mais ceux qu’ils voyaient habituellement était plutôt bleus tirant excessivement sur le gris. Ainsi collé sur le Manners, Malcolm ne prenait pas conscience de toutes les parcelles de leurs corps qui étaient en contact. Il ne réalisait pas que leurs deux torses étaient complètement l’un sur l’autre, que sa hanche effleurait ses côtes, que ses lèvres pourraient toucher celles de Cedrik en moins de trois secondes et que les mains de Cedrik pouvait si facilement l’agripper et se coller à la peau de son dos pour l’éternité. Il ne s’en rendait pas compte, parce qu’il préfèrait se concentrer à essayer de sauver Cedrik, plutôt que de voir le reste. Il aurait pu y avoir le feu à l’appartement, une grenade lancéedans sa fenêtre, Malcolm ne lâcherait pas Cedrik.

Ainsi scotché à lui, Malcolm se perdait petit à petit aussi. Ses pensées vagabondaient, allaient et venaient entre le passé et le présent. À quelques reprises, le visage de Cedrik changea pour celui de l’ami perdu de Malcolm. Les mêmes grands yeux vitreux et perdus, la même situation, sauf que dans les yeux de Marc il n’y avait plus aucune étincelle de vie. Tandis que les yeux de Cedrik montraient encore une certaine vie, une petite flamme de rien, mais qui était tout de même présente. Et c’est-ce à quoi s’accrochait tant Malcolm. Il ne devait pas laissait passer le filon de vie. La flamme ne devait pas s’éteindre dans ces yeux si purs et si verts qu’on se croyait en pleine jungle. La vie ne devait pas quitter Cedrik.


-Non, elles disent vrai, Gillian.

Cedrik l’avait dit de toutes ses forces, mais sa voix n’était qu’un ridicule son. Malcolm sentit que Cedrik le croyait vraiment et il fut empli de tristesse pour lui. Un peu de pitié aussi, mais vite éloignée. Ce sentiment, Malcolm le répugnait et ferait tout pour ne jamais le ressentir. Il l’avait trop de fois senti chez ses parents qu’il ne voulait jamais infligé cette honte à quelqu’un. Même si ce quelqu’un était Cedrik Manners. Malcolm ne savait toujours pas ce que les voix lui disaient, mais savait que, quand ça lui arrivait à lui, les voix disaient toujours juste un paquet de bêtises, question que Malcolm se sente coupable encore plus. Les voix dans les overdoses étaient le fruit exagéré et distordu de la drogue, qui osait parler au nom de la conscience la plus sombre chez la personne. Malcolm ne savait donc pas de ce dont les voix essayaient de convaincre Cedrik, mais il savait que c’était faux ou du moins mille fois exagéré.

-T’es presque amusant, Gillian. Tu parles…tu parles…et tu connais rien.

Malcolm eut un sourire en coin. *Tu es bien placé pour me faire la morale sur le fait que je parle sans rien connaître, monsieur qui ne connait définitivement rien de moi...*

-T’es pas invincible…et j’en ai tué d’autres avant toi.
-Et alors…?!? Tu crois que t’es le seul peut-être?!?


Malcolm avait parlé avec force et véhémence. Il avait l’habitude d’être bête et méchant avec Cedrik et savait pertinemment que la douceur et la gentillesse ne marchaient pas dans cette situation. Si Malcolm ne le brassait pas un minimum, Cedrik resterait pour toujours dans cet univers froid et dégoutant de cet enfer artificiel.

-D’ailleurs, pourquoi tu m’aides?

Malcolm ne s’était jamais arrêté à se dire que Cedrik pourrait éventuellement lui demander ça. Il n’avait pas prévu de réponse et resta l’air hébété quelques secondes. Il n’allait tout de même pas tout lui déballer, c’était ridicule. Puis, il se dit que Cedrik méritait peut-être de savoir le minimum. Après tout, Malcolm le voyait dans un sale état, ça allait juste être plus juste. Et, comme ça, il accepterait peut-être mieux son aide. Encore une fois, le visage de Cedrik fut remplacé par celui de Marc, livide, et Malcolm sentit une grosse boule apparaitre au milieu de sa gorge. Elle était tellement grosse que ça faisait mal au Gillian, même que ses yeux s’emplirent d’eau. Il ravala les larmes et la boule, plutôt difficilement, puis décida d’en dire un peu à Cedrik.

-Je ne sais pas trop… Mais… je crois que je le fais plus pour moi que pour toi, désolé. (petit rire) C’est juste que j’ai été si souvent près de ces situations, et j’en ai échappé quelques unes, que je veux me montrer que je suis capable de faire sauver quelqu’un, pour une fois…

Malcolm ferma les yeux, voulant effacer le visage de Marc de sur celui de Cedrik.

-Et quand… quand je me laissais couler comme tu le fais, j’avais toujours quelqu’un avec moi pour m’aider à revenir à la surface… Alors, laisses-moi t’aider, ok?

Malcolm s’était considérablement radouci. Il sentait ses émotions prendre le dessus. Il ne se sentait plus aussi bon pour réussir à garder fermer le barrage. Comme si, le fait d’être aussi proche de Cedrik, et dans une petite pièce fermée, faisait en sorte que la noirceur de ses songes avait finit par atteindre l’esprit de Malcolm. Le visage de Marc revenait de plus en plus souvent sur celui de Cedrik et Malcolm avait l’impression d’étouffer de plus en plus. Il devait faire quelque chose. Il ferma les yeux très fort, en prenant deux grandes respirations. Puis, il décida donc de soulever Cedrik, pour le pousser plus loin dans le lit, puis il s’étendit à ses côtés. Il passa son bras droit sous le corps de Cedrik, appuya son menton sur le front du Manners et passa son bras gauche autour du torse de son colocataire, environ à la hauteur des hanches. La froideur de corps de Cedrik l’inquiéta et le ramena encore à Marc, mais ensuite il se rappella qu’il devenait froid lui aussi. Le cœur battait tellement vite qu’il prenait toute l’énergie. Ce qui faisait que le corps n’avait pas le temps de se tempérer.

-Oublie les voix, Manners… Concentres-toi sur ma respiration… sur mon battement de cœur…

Il ferma lui-même les yeux, car il lui semblait que les gens sur les photos devant lui avaient soudain toutes le même visage…
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Cedrik Manners

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MessageSujet: Re: Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] Tout ce qui meurt en automne ne revient jamais à la vie [Malcolm] EmptyVen 19 Avr - 0:04

La mort est diffuse. Elle est intouchable, imprenable et, pourtant, elle englobe tout. La mort est une brume noire et translucide qu’on finit toujours par se faire enfoncer au fond de la gorge. Le regard de Cedrik Manner était noir et le jeune homme se sentait aussi détaché de la réalité que la brume. Insaisissable. Il avait revêtu le costume de la faucheuse sans l’avoir demandé et, momifié dans la robe sombre de la mort, il était encore paralysé par l’horreur dont il avait été la cause. Il sentait continuellement la faux enfoncée dans sa poitrine, l’empêchant de respirer convenablement, retenant son cœur de battre assez vite pour qu’il se sente en vie, éraflant sa cage thoracique et laissant couler un sang qui ne pouvait qu’être vite remplacé par ce poison divin qu’il s’injectait dans les veines.

Le plus dur avait été de voir sa sœur mourir. Les enfants n’ont pas le droit de mourir. Ils n’ont même pas eu le temps de vivre. La mort de sa mère avait été une épreuve horrible, mais il allait dans l’ordre des choses qu’un enfant soit un jour orphelin, même si espérer la vie éternelle de ses parents était une chose normale. Ceux qui étaient là avant se doivent de disparaître et laisser les suivants prendre leur place, même si les suivants ont peur, même si les suivants ont encore besoin d’eux, même si les suivants ne veulent pas de cette place s’il n’y a plus personne pour les guider. On ne cesse jamais d’avoir besoin de ses parents, même une fois adulte. Encore maintenant, il y avait des jours où Cedrik n’aurait rien demandé d’autre que les bras de sa mère ou un sourire discret de son père. Sauf que le temps, la mort et la souffrance finissent toujours par avoir raison du reste.


-Et alors…?!? Tu crois que t’es le seul peut-être?!?

À quoi ça sert de vivre quand on a tué sa propre mère?

-Fuck you…je voulais pas…je voulais pas…

Parler était difficile, mais Cedrik s’était senti obligé de répondre aux voix. Il en avait même perdu ce que Malcolm lui avait répondu. Il n’avait jamais souhaité la mort de sa mère et il aurait volontiers pris sa place. Il aurait accepté les pires horreurs pour la sauver ainsi que sa sœur. Sauf qu’aucune horreur ne pouvait se mesurer à la mort. Sauf, peut-être, la folie. Ou encore une vie entière menée par la culpabilité, une vie à s’empoisonner, à s’infliger du mal, à vendre sa dignité. Oui, peut-être que se détruire dans tout ce qui les constituait finirait par compenser pour les vies qu’il avait achevées.

-Je ne sais pas trop… Mais… je crois que je le fais plus pour moi que pour toi, désolé. C’est juste que j’ai été si souvent près de ces situations, et j’en ai échappé quelques unes, que je veux me montrer que je suis capable de faire sauver quelqu’un, pour une fois…Et quand… quand je me laissais couler comme tu le fais, j’avais toujours quelqu’un avec moi pour m’aider à revenir à la surface… Alors, laisses-moi t’aider, ok?

Écouter Malcolm plutôt que les voix était une solution très profitable pour le jeune toxicomane. Il entendait néanmoins leur murmure inquiétant en sourdine, se mélangeant aux mots de son colocataire.

-T’aurais dû choisir quelqu’un qui avait envie d’être sauvé, Gillian. Ça t’aurait rendu la tâche plus facile.

Cedrik eut un petit sourrire. Il aimait bien contredire Malcolm et ce petit plaisir puéril le détachait un peu des voix.

-J’ai du mal à croire que tu aies pu être dans une quelconque situation de faiblesse.

La faiblesse. Cedrik en avait la nausée à chaque fois qu’il réfléchissait à son sujet. Le jeune homme ne se considérait pas comme une personne forte. Il se savait esclave de la drogue car, même si son corps n’avait pas développé la même dépendance maladive que celle que la drogue créait chez les humains normaux, son esprit avait un besoin irrépressible de s’engourdir. Il devait oublier le passé, la mort, mais aussi effacer le présent. Il avait dépouillé son père de tout ce qu’il possédait avant de l’abandonner comme s’il ne valait rien, ne gardant qu’un contact froid et lointain avec lui. Il s’était donné le rôle d’un étranger et, s’il se répétait que c’était pour éviter de donner le cancer à pauvre homme, il sentait au fond de lui que voir la douleur dans les yeux de celui qui l’avait élevé serait trop dur à vivre pour lui. Il préférait donc rester loin. Et seul. Il imposait ce choix à son père, comme il l’avait imposé à Thomas, son ancien copain, et à ses rares amis. Désormais, près de lui, il n’acceptait plus que les aiguilles qui lui trouaient la peau de plus en plus souvent. Il avait besoin de solitude, de dope et de souffrance pour rester en vie. Il n’avait jamais été question d’autre chose que de masochisme. Cedrik Manners était toujours en vie, des années après avoir assumé qu’il était responsable des meurtres de sa sœur et de sa mère, simplement parce qu’il avait besoin de se faire du mal, le mieux possible, le plus longtemps possible. Le plus seul possible.

Combien de pères de familles trop lâches pour sortir du placard ça va prendre dans ton lit, Cedrik? Combien de pères tu vas devoir satisfaire? À combien de pères tu vas devoir te vendre pour te racheter aux yeux du tien?


-Mille…un million…je sais pas…y aura jamais assez de douleur pour compenser… laissez-moi crever lentement…j’en peux plus..

Sa voix rendue rauque par la drogue et la panique était faible. Manners était secoué de faibles tremblements et des larmes lui étaient montées aux yeux, mais refusaient de couler sur ses joues. Même la tête la première vers le gouffre, il lui restait un minimum de fierté devant Malcolm Gillian.

-Oublie les voix, Manners… Concentres-toi sur ma respiration… sur mon battement de cœur…

S’il n’avait pas été aussi déconnecté, Cedrik lui aurait bien dit où se le mettre, son cœur… Seulement, le jeune drogué avait justement besoin de repères, de chaleur, d’un phare. Et Malcolm Gillian était ce qu’il y avait de plus stable dans sa vie ce soir-là. Cedrik utilisa donc le peu de force physique qu’il lui restait pour se coller davantage contre l’autre homme. Il était vrai que sa chaleur faisait ramollir le chant destructeur des voix dans sa tête. Le jeune homme à l’âme émiettée bougea la tête et leva son regard perdu vers le visage de ce qu’il avait de plus semblable à un ami dans sa vie. Pendant une seconde, il sembla sur le point de dire quelque chose, mais il se ravisa, baissa les yeux et appuya son front contre le torse de Malcolm. Puis, à coups de battements rassurants, il chassa les voix, une par une, jusqu’à s’endormir, complètement vidé, d’un sommeil noir dans lequel même les cauchemars se perdent.
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