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| L'illusion de Noël [Marek] | |
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| Sujet: L'illusion de Noël [Marek] Ven 3 Déc - 19:26 | |
| Marek & Axel
Cet atroce calme qui précède la tempête, et ce silence de mort pesant dans l’atmosphère était le paradoxe courant des réveillons. Les familles se réunissaient dans un lieu restreint, dans une demeure privée, éclairée, décorée. Plus aucun ne sortait, les rues étaient vides et même les sans abris avaient décidé de se rejoindre à l’abri sous un pont pour célébrer cette chaleur dans leur cœur plus importante que celle qui pouvait sauver leurs doigts. La maison d’Axel n’était même pas décorée. Cette fête était sacrée, elle était l’accomplissement d’un lourd travail social. La récompense de celui qui avait fondé sa famille. Autrefois, il le passait en compagnie de cette famille d’accueil. Ses cousins étaient toujours là. Il recevait des présents, mais il ne comprenait jamais en quoi il les avait mérités. Il était toujours ailleurs, il regardait sa mère adoptive, et il se l’imaginait avoir un accident de la route en allant chercher la bûche de noël. Il posait son regard sur son père, et là il voyait un serpent venimeux sortir de son emballage pour le mordre à la gorge, et l’éradiquer de ce monde. Il observait son oncle, et c’était cette si délicieuse dinde qui mettait fin à sa vie par quelques onces de cyanures dissimulées dans sa chair. Quant à la tante, il la voyait chuter dans les escaliers et se rompre le cou. Chaque année, ces pensées envahissaient son esprit. Il n’en avait pourtant pas envie, mais il se demandait s’il réussirait à éprouver de la tristesse, ou s’il resterait de marbre devant une telle épreuve. Il regardait la neige, et il gardait au fond de lui que peut-être, les parents de son père et de sa mère ne pourront pas arriver jusqu’à la maison. Peut-être leur voiture avait-elle glissé sur du verglas, et fini dans un étang. Peut-être aussi que ses cousins jumeaux, qu’il aimait tant, allaient être victime d’un drame le lendemain lorsque, en sortant jouer dans la neige, l’un d’eux s’ouvrira la tête dans une vilaine chute. Et si toutes ces choses arrivaient, comment réagirait-il ? Les voix lui soufflaient ces horreurs, chaque année, tout en lui demandant si ça l’affectait vraiment. Au fond, il n’en savait rien. Alors ces soirs de réveillons, il mangeait. Il ne souriait presque pas, il se prêtait par bonne foi aux jeux de sa famille, il faisait semblant d’être celui qu’ils voulaient voir. Et il savait qui être, il savait comment se comporter, c’était écrit dans leur tête à eux. Alors il était le garçon qu’ils voulaient voir, un soir de noël. Il ouvrait ses présents, il remerciait sa famille et, tard dans la nuit, partait se coucher. Le lendemain, sa mère adoptive l’emmenait à la messe, et il ne fallait surtout pas la rater.
Le tueur à gage marchait seul près des bateaux, à quelques centimètres seulement de l’eau. Le brouillard était si dense qu’il lui était impossible de voir à plus de quelques mètres. Mais ce climat lui paraissait tellement plus fascinant, qu’une vue donnant sur des immeubles et des constructions humaines. Les mains emmitouflées dans des gants de cuir marron, eux même enserrés dans des poches. La tête retroussée et penchée en avant pour garder le menton au chaud dans une écharpe épaisse, et quelques mèches de cheveux congelées trahissaient le temps qu’il avait passé dehors. Un long manteau brun le recouvrait et empêchait à de nombreuses brises glaciales de lui donner envie de retourner chez lui. Une arme à feu silencieuse était dissimulée dans l’une des poches internes de ce manteau. Son autre silencieux était quant à lui coincé entre son dos et sa ceinture, là où il avait toujours l’habitude de la mettre. Il ne sortait jamais sans ses armes à feu. Il se voyait encore ces soirs de fête, où il goûtait à des mets plus savoureux que les autres jours. Des sauces fruitées, et des friandises à ne plus compter. Mais il avait un lourd retard sur sa croissance, et il ne mangeait pas les chocolats. Il les donnait à son cousin, il aimait sentir le bonheur et la gratitude dans leur esprit lorsqu’il leur tendait une poule en chocolat. Il trouvait cette sensation plus exquise que celle de la nourriture fondant dans son palais. Il voyait encore les papillotes étalées sur la nappe blanche ou rouge, parmi les paillettes dorées en forme d’étoile, de traineau, de flocon ou bien de père noël. Il sentait cette odeur de viande qui provoquait des gémissements de bien être parmi les convives, et qui provoquait l’impatience dans les estomacs les plus farouches. Il entendait encore les rires de sa tante, plus aigus et peut-être trop nombreux à son goût. Quelques fois, il s’était imaginé lui enfoncer une serviette profondément dans la gorge lorsqu’elle était prise d’un éclat de rire. Ses deux cousins qui se chahutaient et qui le chahutaient lui aussi, proposant sans cesse des jeux amusants à faire en attendant le dessert. Parfois ils abandonnaient les adultes, montaient à l’étage et s’enfermaient dans une chambre pour jouer tous les trois. Peut-être un des rares souvenirs qui pouvait tirer une once de bonheur sur son visage de marbre, parce qu’il préférait se retrouver seul avec ses cousins, ses modèles. Ses voix étaient moins présentes et lui soufflaient moins d’idées de meurtre. Il n’avait plus les pensées de ces adultes, qui ne voyaient que la pratique, les manières ainsi que des choses trop mûres pour l’enfant qu’il était. Ce que son oncle avait l’intention de faire à sa tante une fois qu’ils seront seuls, Axel ne voulait pourtant pas le savoir…
Des craquements mous et réguliers le berçaient mélodieusement dans ce silence lourd. Ses yeux étaient rivés sur l’horizon enneigé, et se levaient parfois pour braver les flocons qui descendaient par milliers. Une infinité parsemée de ces lueurs blanches et chancelantes. Ce n’était pas des étoiles, c’était les flocons épais qui continuaient leur descente folle parmi l’air glacial. Une sensation de vertige agréable le prit et il contempla durant de longues minutes la fumée grise de sa cigarette s’élever, allant à l’encontre de la neige qui tombait. Une étrange vibration se fit sentir près de sa cuisse, et il osa sortir une main gantée de sa poche pour prendre son téléphone. « Où es-tu ? ». Axel observa l’écran un court instant avant d’entamer une réponse. Pourquoi Marek lui posait pareille question ? La soirée allait bientôt commencer, il devait probablement être avec les ‘siens’. Un homme comme Marek avait forcément une famille ou plutôt des amis avec qui passer le réveillon. Mais le tueur était trop perdu dans ses pensées pour s’en préoccuper davantage, et il lui répondit rapidement qu’il se trouvait sur le port, avant de ranger son portable et de l’oublier totalement. Depuis sa fuite, il fêtait noël seul. Pourtant, il était incapable de dire si ces soirées en ‘famille’ lui manquaient. Non. Non il préférait la solitude, la vue de ce blanc immaculé au bruit et aux semblants de joie qu’il devait toujours fournir. Là, il avait le droit d’être ennuyant, il pouvait être rabat-joie sans que personne ne le lui reproche. L’homme continua sur un ponton de bois. Et l’eau du port n’était pas de glace. Quelques vaguelettes continuaient leur course folle pour s’éparpiller sur la coque des bateaux. Il pensait à sa journée. Il avait travaillé au matin, il savait que sa patronne n’était pas du genre à fêter noël, et elle saisissait même l’occasion de cette fête pour trouver plus facilement ses cibles et semer un peu plus la terreur. Lui, il la suivait par totale dévotion. Cette matinée lui avait été précieuse, car il avait agit selon des ordres, et son travail lui permettait de ne pas laisser les voix le harceler trop vivement. Une fois de retour chez lui, il avait cette petite cage de bois qu’il ne cessait de réparer. D’un point moral, ce qu’il avait fait était mal. C’est ce que les voix lui disaient. Alors il devait être puni, il devait subir une sanction sévère afin de se donner meilleure conscience. Il ouvrait cette grande caisse de bois solide et rafistolée de partout, il s’immisçait à l’intérieur puis refermait soigneusement à l’aide d’un verrou. Dans le noir complet, il lâchait ensuite ce verrou et se recroquevillait sur lui-même pour attendre. Une dizaine de seconde passait, puis sa claustrophobie se manifestait la première. Il commençait par plaquer ses mains sur le bois, par regarder autour de lui, par chercher le verrou. La kénophobie intervenait ensuite et il se mettait à trembler. Il lui était impossible d’ouvrir tellement ses poignets étaient soudainement secoués par la terreur. Il toquait sur le bois, il criait à ses voix de le faire sortir, et sa panique grandissait. Il commençait à haleter, il donnait des coups de pieds derrière lui, son corps se tordait sans qu’il ne s’en rende vraiment compte et il s’écorchait les coudes et les mains en frappant où il pouvait. Puis il commençait à suffoquer à cause de cet état de stress dans lequel il se mettait lui-même. La crise d’angoisse redoublait d’intensité lorsqu’il gigotait comme un vers de terre que l’on aurait coupé en deux. Cet espace bien trop confiné lui donnait la sensation d’étouffer, comme lorsqu’on le prenait dans nos bras autrefois. Il poussait des râles étouffés et devenait une sorte de bête en cage qui menaçait de s’évader. Il suppliait ses voix de le laisser sortir, toute logique disparaissait de son esprit et il ressentait comme une lourde et trop forte pression s’abattre autour de lui. Il n’entendait rien, ne voyait rien, et il se débattait contre une créature imaginaire qui tentait de le ligoter, de l’immobiliser pour lentement l’étouffer. Puis, comme à chaque fois, il frappait de plus en plus fort et finissait par craquer la cage. Son poing traversait le bois, libérant un rayon de lumière d’une des nombreuses lampes de sa chambre. Il se précipita sur cette brèche pour l’écarter, pour la grossir, pour briser le bois et s’en sortait toujours avec plusieurs écorchures. Une fois dehors, il prenait une grosse bouffée d’air en se penchant par-dessus la fenêtre. Puis il s’écroulait sur son lit et se recroquevillait de nouveau sur lui-même, les bras tremblants, parfois saignants, et poussant quelques plaintes involontaires. Souvent, il mettait une bonne heure et demie à s’en remettre. Et c’était toujours dans ces situations de prise d’angoisse qu’il tentait de se donner la mort. Lorsque c’était chez lui, il procédait de la même manière. Il finissait par se lever, chancelant, se dirigeait vers son vivarium et plongeait son bras nu à l’intérieur. Senek devenait agressif devant cette brusquerie, et plantait ses crochets venimeux dans la peau de son maître. Mais plutôt que de se laisser mourir, Axel se dirigeait toujours vers le comptoir pour s’injecter l’antidote. Il faisait ça pour se donner bonne conscience, car il était persuadé que s’il ne faisait rien pour se sauver, il se damnerait éternellement et les voix ne le lâcheraient jamais. Puis il s’allongeait sur le sol, et il attendait, si le remède le sauverait, ou si cette fois il allait mourir. Mais jamais il ne mourrait.
L’homme cracha un filet de fumée plus long que les précédents. Il sentait quelques pansements dans le dos de ses mains, au niveau de ses poignets et de ses bras frotter contre le cuir de ses gants. Cela le démangeait, mais il avait adopté une position trop chaude pour oser bouger. Il se contenta de coller son bras contre son bassin et d’essayer de se gratter en gardant les mains dans les poches. Il continua son avancée en se ressassant le reste de la journée dans la tête. Il n’avait pas fait de tentative de suicide aujourd’hui. Non, il n’en avait pas fait depuis longtemps. Après s’être remit de cette crise d’angoisse qu’il avait lui-même provoquée, il s’était assis sur le sofa, en face du vivarium, puis il avait observé durant un long moment son serpent. Il lui avait parlé aussi, bien qu’il sache que Senek ne pouvait ni l’écouter, ni le comprendre et encore moins lui répondre. Mais tant mieux, parce qu’Axel craignait d’être comprit et ne souhaitait pas entendre de réponse. Dans l’après midi, il avait acheté de la viande, un peu d’alcool et de soda. Quelques aliments peu communs que l’on mangeait lors de fête, puis des bougies. Car s’il était toujours seul lors des réveillons de noël, il n’empêche que la tradition était ancrée en lui. Manger quelque chose de particulier, allumer des bougies… En revanche, il n’allait plus à la messe. La dernière fois qu’il s’y était rendu seul, une dame âgée lui avait affirmé qu’il était possédé par le démon. Axel parti tout au bout du ponton, jusqu’à l’impasse. À droite, de l’eau. À gauche, un bateau modeste. En face, de l’eau : la fin du pont. Il resta planté là, debout à regarder les flocons tomber dans l’eau. Il n’y a pas à dire, la neige le détendait. Il ne se rendit même pas compte que le froid venait d’éteindre sa cigarette. Il reprit pleinement conscience lorsqu’une présence s’immisça dans sa tête. Des craquements ne tardèrent pas à se faire entendre, et il fit volte face pour se retrouver face à… Marek ?
« Que fais-tu là ? » lui demanda-t-il, visiblement surpris de trouver cet homme ici. Peut-être un peu gêné, aussi. D’autant plus qu’il savait que Marek n’appréciait pas tellement le froid ni la neige. « Personne ne t’attend ? »
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| | | Marek d'Alembert
* * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * Le mec aux mille visages
Messages : 4735 Date d'inscription : 15/04/2010 Localisation : Au port, à regarder la mort entre les vagues.
| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Mar 7 Déc - 13:22 | |
| [Le truc pour faire jouer la musique marche pas de chez moi. Je suis allé la trouver et...excellent choix hein!] [Waaaahhh tu sais que je t'adore?! Ton post est tout simplement merveilleux.] Il y avait déjà une bonne semaine que San Francisco avait pris son abonnement complet à la magie de Noël. Les gens pressés avaient commencé à se bousculer sur les trottoirs et aux entrées des magasins. Tout le monde courait pour effectuer les derniers préparatifs de cette soirée qu’on disait si spéciale. Les pères Noël s’étaient mis à arpenter les rues, cloche à la main, fausse barbe et sourire stupide au visage pour dire à tout le monde à quel point ce temps de l’année était merveilleux. Le rouge et l’or descendaient le long des immeubles en rubans et en paillettes, et des lumières décoratives éclairaient le paysage le soir venu. Au dernier jour avant l’explosion de festivités qui aurait lieu, le soir, dans la majorité des foyers, il ne restait que quelques vendeurs de sapins, sur la rue, qui essayaient d’écouler leurs derniers spécimens. Le meilleur temps de l’année, disait-on. Marek n’en était pas persuadé. Peut-être était-ce parce qu’il ne courait pas, comme tout le monde, et qu’il observait la folie qui avait cours autour de lui. Le jeune homme avait pris quelques photos des décorations les plus excessives, des magasins les plus chargés, des visages les plus heureux… Mais il n’avait toujours pas été touché, cette année-là, par le fameux esprit de Noël. En jetant un coup d’œil aux autres photos qu’il avait prises depuis quelques jours, on comprenait mieux comment son enthousiasme, déjà minime, avait pu être diminué. Entre les femmes croulant sous les sacs des plus grands magasins et les enfants qui couraient dans la neige, il y avait d’autres images. On pouvait voir cette petite fille qui tenait la main de sa mère en dévorant des yeux une poupée, dans la vitrine d’un magasin, alors que sa mère n’avait même pas de vêtements chauds et que ses doigts étaient tout bleuis par le froid. Il y avait aussi ce vieil homme aux vêtements déchirés, recroquevillé sur le bord d’un immeuble alors que les passants l’ignoraient ouvertement. C’était ça, le merveilleux esprit des fêtes, cette magie indescriptible qui rendait la vie plus belle pendant un moment dans l’année. C’était cette folie qui faisait oublier à quiconque en avait les moyens l’existence de la misère et de la solitude. Et Marek savait que, s’il n’avait pas fait partie de ces gens incroyablement seuls, il n’aurait certainement rien remarqué de la froideur que la nuit de Noël pouvait avoir.
Les années précédentes, Marek avait vécu dans cet égoïsme moelleux qui caractérise le commun des mortels, et encore plus durant la période des fêtes. Lui aussi, il n’avait pensé qu’à ce qui le concernait et il avait même trouvé du charme aux petites lumières que des gens avaient passé des heures à installer à l’extérieur de leurs maisons. L’année précédente, il avait moins pensé à Noël qu’à sa manière de s’en servir pour avoir Christo, mais il s’était tout de même laissé bercer par la musique thématique des fêtes et son regard s’était stupidement ravi des décorations un peu excessives de l’hôtel. Il avait fait parti de ces gens pressés et ridiculement euphoriques qui achetaient des cadeaux pour ceux qu’ils aimaient en espérant n’oublier personne. Il en avait même envoyés quelques uns à sa famille, avec des cartes, en plus, pour leur exprimer des vœux qu’il avait oubliés dès qu’ils avaient été postés.
Le temps des fêtes, dans la famille de Marek, avait toujours été le même, année après année. Tout le monde avait son rôle à jouer et s’y employait à la perfection. La soirée du réveillon qui avait lieu chez eux réunissait non seulement toute la famille plus éloignée, mais aussi un grand nombre d’amis de la famille et de connaissances. C’était un évènement social très attendu auquel il était impensable de ne pas assister. Le milieu dans lequel avait grandi Marek était composé de gens très riches qui se prenaient assez au sérieux. Noël était l’excuse par excellence pour se montrer avec ses plus beaux habits et pour offrir les cadeaux les plus coûteux, simplement pour cultiver cette impression de grandeur qui habitait et nourrissait presque chaque personne. Tout le monde se réunissait autour de l’immense table de la salle de réception du manoir de la famille de Marek et on s’extasiait devant la beauté des décorations de la demeure, lesquelles valaient souvent plus que le prix d’une voiture. Puis, après des heures à déguster les plats les plus finement cuisinés, on passait à la salle de bal, où on dansait et discutait avec une noblesse calculée. Dans le fond de la salle, juste devant l’immense fenêtre qui faisait toute la hauteur du mur, un sapin tout aussi grandiose trônait. L’ambiance des fêtes irradiait de chaque détail dans le manoir et les invités étaient toujours comblés par leur réveillon. Mais Marek n’était pas un invité et il n’était pas comblé. Les soirées du genre, avec les sourires artificiels et les postures soignées, l’ennuyaient, le dérangeaient. Ses parents lui avaient fait comprendre plus ou moins subtilement que se promener avec une caméra autour du cou était réservé au photographe qu’ils avaient engagé pour l’occasion, et non à lui. Marek se retrouvait donc généralement à faire semblant de s’amuser avec un talent incroyable qui dupait tout le monde ou, si ses parents avaient le dos tourné, à draguer outrageusement toute jolie personne qui lui tombait sous la main.
Il y avait peut-être deux mois que Marek n’avait pas donné signe de vie à sa famille. Ils devaient bien s’en sortir sans lui, puisqu’il n’était toujours pas recherché par la police. Il aurait pu prendre l’avion et aller les rejoindre, pour le temps des fêtes. Ses parents et tout leur réseau social se seraient montrés parfaits. Il aurait eu de beaux cadeaux, il aurait pu participer aux fêtes les plus somptueuses et il n’aurait pas été complètement seul, mais l’idée ne l’enchantait aucunement. Le jeune homme aurait préféré se laisser geler dans la neige plutôt qu’aller jouer au fils parfait dans une soirée surchargée de conséquences sociales. De plus, il ne voulait pas montrer à ses parents qu’il était seul, sur un autre continent, le soir de Noël. Il était parti pour réussir de lui-même ou, du moins, c’était ce qu’il leur avait dit. Revenir serait assumer un échec, ce qui était impensable quand on considérait dans quel genre de milieu il avait appris à vivre. Marek avait donc décidé de passer le temps des fêtes seul et, comme le bar où il travaillait était fermé pour le réveillon, il se retrouvait à errer dans une rue dont il ne connaissait même pas le nom alors que tout le monde était bien au chaud en train de se préparer à jouer une longue scène de bonheur cliché. Même la petite organisation louche pour laquelle il travaillait avait donné congé à tout le monde…
L’air de rien, il passa devant l’appartement d’Axel, une des très rares personnes qu’il côtoyait sans en avoir l’obligation. Il n’était pas là; comme si c’était étonnant. Logiquement, en dehors d’un exilé qui avait essayé de détruire toux ceux qui s’étaient approchés de lui, tout le monde avait quelque chose à faire à Noël. Marek se trouva stupide d’être venu voir s’il était là, mais il se demanda tout de même où il pouvait se trouver. Axel n’était pas de la région et il n’avait pas semblé avoir pour projet de quitter le coin pour aller voir sa famille. Avec de la chance, peut-être fêtait-il avec des amis, dans un quelconque lieu public où Marek pourrait aller le rejoindre… C’était complètement pathétique, mais le vide de son appartement lui faisait bizarrement peur, ce soir-là. Il avait besoin de quelqu’un, et il lui semblait qu’il n’avait plus personne d’autre qu’Axel. Il lui envoya donc un message, sur ton téléphone, en se répétant qu’il n’obtiendrait certainement pas de réponse, puisque c’était Noël, mais il reçut un message en retour très rapidement. Il ignora les dizaines de questions que la réponse d’Axel souleva dans sa tête et il se rendit au port pour le retrouver.
Et c’est là qu’il le vit, malgré le brouillard. Une forme sombre, contrastant avec le blanc enveloppant de l’endroit, qui aurait pu être inquiétante si Marek n’avait pas su qu’il s’agissait d’un ami. Il faisait encore plus froid, à cet endroit de la ville. C’était en partie dû à la proximité de la mer, mais l’absence d’immeubles permettait au vent de courir dans tous les sens et de s’immiscer dans la moindre ouverture de l’armure de vêtements dont Marek s’était recouvert. Un frisson, probablement le premier d’une longue série, fit regretter au jeune homme de ne pas avoir comme pouvoir magique de contrôler la température. Foutu hiver. Le dos voûté par le froid, Marek s’approcha d’Axel en laissant son regard dériver vers l’eau. Elle n’était pas gelée, mais elle devait être glaciale.
« Que fais-tu là ? Personne ne t’attend? »
Marek releva les yeux en souriant, un peu gêné d’être arrivé sans prévenir et, aussi, parce qu’il devait confirmer sa solitude évidente le soir de Noël.
« Je suis venu te voir. Et oui, toi, tu m’attendais. »
Moqueur, il combla les derniers mètres qui les séparaient pour venir se poster juste à côté d’Axel avant d’ajouter : « Sauf si tu attendais quelqu’un d’autre, bien sûr. » |
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Ven 10 Déc - 7:09 | |
| [C’toi qu’est merveilleux.] Un vent glacial déposait sur la facette de ses joues quelques perles brillantes et douloureuses qui laissaient une sensation salée lorsqu’elles atterrissaient trop près de ses lèvres. Les petites gouttelettes provenant de la mer étaient à elles seules plus dévastatrices que les gros flocons qui s’accrochaient aux vêtements. Mais même le silence et cette vue immaculée valait bien toutes les morsures que le froid causait. C’est du moins ce qu’il se disait, car il pensait ne pas ressentir trop d’engourdissement sur ses joues. Il frémissait parfois, mais il ne s’agissait que de quelques traversées serpentines d’une onde nerveuse qui hérissait ses poils avant de les calmer aussitôt. On appelait cela la chair de poule. Il avait l’impression étrange que son esprit n’était pas ancré dans son corps. Qu’il s’élevait lentement et qu’il flottait de plus en plus haut pour profiter d’une vue panoramique. Quant à son enveloppe charnelle, elle se tenait immobile et raide comme un pic de glace, comme une coquille vide qui attendait patiemment le retour de son âme pour reprendre vie. Cette sensation de légèreté ne dura pas et se rompit dès lors que sa télépathie s’éveilla en lui. Il détecta la présence d’un autre esprit, non loin, de pensées soudaines et curieuses qu’il reconnaissait malgré lui. Il se tourna lentement, encore un peu embrouillé par cet état de transe qu’il venait de quitter. Les questions qui écorchèrent ses lèvres démontrèrent sa surprise et sa lenteur à se remettre de ses émotions. Il ne pouvait s’empêcher de sonder cet homme du regard, afin de répondre aux milliers d’interrogations qui filaient dans sa tête. Peut-être avait-il du mal à se rendre compte que cette personne, venue troubler sa somnolence dans ce port, n’était autre que Marek. Peut-être était-il incapable de s’avouer à quel point il était heureux d’avoir cette compagnie, alors qu’il se prétendait à lui-même vouloir la solitude et le silence. Dans cette ambiance, il aurait même été moins étonné de revoir un des membres défunts de sa famille adoptive, que cet individu qui se trouvait actuellement devant lui. Est-ce qu’il s’agissait d’une hallucination ? Est-ce que l’état psychologique d’Axel empirait à tel point de lui montrer des images et des sons pouvant paraître aussi réels ? Qu’est-ce qui était le plus étrange, le fait d’avoir en face de soit Marek, alors qu’il savait pertinemment que ce dernier connaissait beaucoup de monde, était sociable, n’aimait pas le froid et avait probablement toutes les occasions de passer un noël au chaud et en bonne compagnie. Ou alors le fait que les pensées du télépathe réagissaient différemment à cette visite qu’à n’importe quelle autre ? Si une autre personne était venue à sa rencontre, s’il s’agissait même de sa mère ou de son père non biologiques, quelques années plus tôt, ou encore l’un de ses cousins, il savait qu’il aurait éprouvé comme une déception à ne plus pouvoir trouver la tranquillité. Ici, il était tellement étonné que Marek soit venu le voir qu’il réussissait facilement à se cacher à lui-même à quel point il était soulagé de l’avoir avec lui.
Alors comme ça, le photographe passait lui aussi un noël seul. La surprise passée, Axel ne put s’empêcher de voir que la solitude n’était pas aussi agréable du point de vue de Marek que du sien. Mine de rien, le schizophrène était touché que l’étudiant l’ait rejoint sans même s’être assuré qu’il était avec quelqu’un ou non. De toute manière, Axel aurait instinctivement abandonné n’importe quelle compagnie s’il avait aperçu Marek. Il ne s’en serait probablement pas rendu compte mais l’aurait fait dès les premières secondes. À part peut-être si cette compagnie était celle de sa patronne, mais il se voyait mal fêter noël avec elle. À l’heure qu’il est, le bus scolaire devait déjà avoir explosé dans un quartier éloigné de la ville. Dedans se trouvaient probablement les enfants des prochaines cible d’Ashley, des hommes qui allaient s’en mordre les doigts de se l’être mit à dos. Le tueur à gage laissa échapper une petite esquisse de lèvres ressemblant à un sourire en coin sur sa peau gelée. C’était cette manière si naturelle de s’exprimer et d’essayer de deviner en plaisantant les intentions qui plaisait le plus à Axel. Marek avait une arrogance que le fou n’avait pas, mais ce dernier se sentait toujours plus confiant lorsqu’il s’agissait de lui répliquer. Il finira par en avoir l’habitude et par toujours savoir quoi dire, comme savait si bien le faire le photographe. Oui, Axel l’attendait en quelques sortes. Sans le savoir. Ca lui paraissait logique puisque maintenant qu’il était là, il n’avait plus vraiment envie de rester à ne rien faire. Il ne voulait pas infliger ça à Marek, alors que ce dernier avait déjà du faire de gros efforts pour sortir sous cette température glaciale.
« Non, personne d’autre que toi. » répondit-il en rentrant volontairement dans le jeu de Marek. Il tourna de nouveau la tête vers la mer, reprenant son sérieux si ennuyant, puis il finit par se tourner vers le photographe qui s’était posté à ses cotés. Il avait beau connecter le plus possible son esprit à celui de Marek afin de ressentir tout ce qu’il pouvait bien ressentir, il désirait lui parler en plus et ne pas laisser un vide gênant s’installer entre eux, un silence qui pourrait faire regretter à Marek d’être venu jusqu’ici. « Tu n’as pas pu rejoindre ta famille ? » demanda-t-il simplement en essayant de comprendre pourquoi cet homme était seul. Il était pourtant persuadé qu’il devait avoir un cercle de connaissances et de proches très large, alors il était difficile pour Axel de concevoir que Marek puisse passer un noël seul. L’homme se rendit compte que la cigarette qu’il avait dans la bouche était éteinte depuis un bon moment déjà. De toute manière elle était terminée, réduite à la taille d’une bille et impossible à rallumer sous le gel. Il sortit donc une main de sa poche et la décrocha avant de la jeter au sol et de l’écraser. Il remonta ensuite son écharpe devant sa brune, soupirant devant la petite bouffée de chaleur qui vint dégeler ses lèvres bleues. L’homme tourna ensuite la tête derrière lui lorsqu’il détecta un autre esprit qui s’approchait. Ignorant de qui il s’agissait et n’étant pas tellement paranoïaque, il ne s’en inquiéta pas et reposa son regard sur Marek. Pourtant, il finit par entendre inconsciemment les pensées qui se rapprochaient, bien que le ou les hommes étaient encore loin pour que les voix soient nettes. Axel avait l'habitude d'avoir accès aux raisonnements des individus et c'était si pénible qu'il faisait toujours tout pour ne pas écouter. Il ne chercha donc pas à en savoir plus et tenta de se focaliser le plus possible sur l'âme de Marek afin de ne pas prêter attentions aux individus qui s'étaient arrêtés, au loin, et dont on pouvait distinguer la silhouette dans la brume épaisse et blanche.
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| | | Marek d'Alembert
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Sam 11 Déc - 0:20 | |
| [Non, toi.] [J’avais pas le temps de te répondre, ce soir. Mais j’ai décidé que ma volonté pouvait bien se moquer du temps, un peu.] Marek détestait la neige, mais seulement lorsqu’il était dehors. Il pouvait la regarder, à travers une fenêtre, sans ressentir le vague dégoût qui l’envahissait quand un flocon frôlait sa peau. Plus que la poussière blanche, c’était la froideur que Marek ne supportait pas. Un hiver sans neige mais tout aussi glacial lui aurait paru horrible. La neige n’était que du froid à l’état solide. Le ciel engloutissait la chaleur sous des milliers de flocons, réduisant au blanc aveuglant les couleurs vivantes de l’automne. Bien sûr, les minuscules étoiles qui tombaient une à une à la lumière d’un lampadaire avaient un certain charme, même quand elles venaient mordre la peau du jeune homme, mais des flocons plus gros, plus nombreux ou simplement une trop longue sortie à l’extérieur gâchait cette pale beauté. Marek était sensible au froid, même avec un gros manteau, deux chandails et beaucoup de volonté. Il semblait que l’air hivernal parvenait toujours à se glisser entre les mailles de son armure de vêtements pour aller doucement torturer sa peau. Parfois, s’il combattait son besoin de retrouver la chaleur et qu’il restait très longtemps dehors, il avait l’impression que le froid le traversait et allait engourdir l’intérieur de son corps. Son cœur gelait, sa tête prenait une pause. Plus rien n’existait d’autre que l’hiver qui le trouait de sa blancheur vide et lumineuse. Puis, un terrible frisson le secouait et son cœur semblait se remettre douloureusement à battre. Le moment de paix, qui ne durait jamais plus que quelques secondes, semblait n’avoir jamais existé et l’hiver reprenait ses allures de monstre diffus.
Inconsciemment, c’était peut-être cette paix indescriptible que Marek avait cherchée en choisissant de rester la victime des flocons plutôt que rentrer chez lui. Comme dans la plupart des cas, il ne l’avait pas trouvée. Il fallait plus qu’un soir de fête pour que Marek d’Alembert lâche prise sur son précieux sentiment de culpabilité. Sans comprendre pourquoi, il avait donc écrit à la seule personne qui comptait pour lui et qui ne lui en voulait pas encore. Une fois qu’il avait localisé Axel, il n’avait pas été question qu’il lui formule une quelconque demande. Marek s’imposait. Point. Il s’était donc rendu dans le port pour voir son ami. Une part égoïste en lui avait été soulagée de le trouver seul. Il lui avait semblé que Noël ne serait peut-être pas si horrible, au final, s’il pouvait le passer avec lui. Toutefois, une autre partie de lui s’était tordue de le savoir seul, ce soir-là. Des dizaines d’explications pouvaient justifier qu’Axel soit dehors tout seul le soir de Noël mais, quelle que soit la raison de son isolement, la réalité restait la même. Il n’y avait donc eu personne pour réclamer sa présence? S’il n’avait pas lui-même été persuadé que l’autre homme devait être occupé, il lui aurait proposé depuis un bon moment de passer la soirée avec lui. Étrangement, soudain, cette idée le gênait. Et si Axel avait tout simplement refusé? Après tout, c’était bien son genre de passer Noël en solitaire. Au fond, peut-être que Marek venait de briser son moment de quiétude.
« Non, personne d’autre que toi. »
Marek sourit. Axel avait ce don de le faire sourire avec presque rien. Il essayait l’humour, mais il reprenait aussitôt un air sérieux, comme si son esprit risquait de s’endommager s’il faisait rire quelqu’un. Il semblait vaguement mal à l’aise, presque en permanence, avec la plupart des gens. Aux yeux de certaines personnes, cette attitude aurait pu sembler pesante et ennuyante, mais Marek appréciait Axel au-delà de ce qu’il considérait comme des détails.
« Tu n’as pas pu rejoindre ta famille ? »
Ah tiens… Ce n’était pas de l’humour, cette fois, mais Marek aurait préféré ne pas avoir à répondre sérieusement. Il trouvait sa situation un peu pathétique et il ne tenait pas à passer pour une victime du temps des fêtes aux yeux d’Axel. Aussi répondit-il plutôt évasivement : « Je leur ai envoyé des cartes de souhaits… »
C’était assez peu, comme réponse, et il fallait s’attendre à d’autres questions, même de la part d’Axel. Il se montrait moins curieux que Marek, ne laissant pas paraître ce genre de besoin de tout connaître en mille et un interrogatoires qu’avait l’autre homme, mais il était normal qu’il demande des précisions à une réponse si vague. Marek fixa un flocon qui descendait jusqu’à ce qu’il ait atteint le sol.
« Disons juste que je n’avais pas vraiment envie d’aller les déranger à l’autre bout de la planète. », dit-il, toujours en fixant le flocon qui s’était maintenant perdu parmi ses semblables au sol. Il releva un regard qui se voulait léger vers l’autre homme. Il ne voulait surtout pas donner l’impression, fondée, que sa famille n’aurait pas spécialement apprécié sa présence et qu’en dehors de celle-ci, il n’avait personne d’autre que lui avec qui passer Noël. Marek d’Alembert était indépendant, positif et de compagnie divertissante. Point. Laisser entrevoir la pointe de sa tristesse et risquer qu’on découvre l’iceberg ne faisait jamais partie de ses plans.
L’attention de Marek fut attirée par un point étrange, sur la poitrine d’Axel, du côté gauche. C’était un petit point rouge qui n’était pas totalement immobile. Le jeune homme mit instinctivement son doigt sur la poitrine de l’homme devant lui et réalisa que le point en question était une sorte de petite lumière. Un signal d’alarme hurla à l’intérieur de lui et il dut se contrôler pour ne pas pousser Axel de toute ses forces, car c’était bien la mer glaciale mais liquide et enveloppante qui était juste derrière lui. Marek le tira donc violemment vers lui pour le faire tomber sur le sol.
« Quelqu’un allait te tirer dessus. »
Était-ce le vent ou son cœur qui tapait aussi fort dans ses oreilles ?
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Sam 11 Déc - 7:20 | |
| [Hoooooon la fin, t’es fantastibuleux !] « D’accord. » répondit-il simplement, comme si cette réponse lui suffisait amplement. Ca ne le regardait pas, et puis s’il désirait creuser un peu plus, il lui suffisait de lire dans la tête de Marek pour comprendre que ce dernier n’avait pas souhaité rejoindre sa famille, que sa situation ennuyante le jour de noël était tout à fait volontaire. Mais Marek dut s’en vouloir d’avoir donné une réponse aussi vague, et il ajouta quelque chose quant à sa famille. Est-ce qu’il ne désirait pas les déranger, ou bien est-ce qu’il ne voulait tout simplement pas les voir ? ‘Bienvenue au club’, failli lui dire Axel. Car ce dernier oubliait presque toujours que ses parents adoptifs n’étaient plus de ce monde. Il lui arrivait de faire des rêves où il rentrait enfin chez lui. Il lui arrivait constamment de se dire que son voyage avait assez duré, et qu’il lui suffisait de quelques heures de routes pour rentrer à la maison. Que ses parents le prendraient à moitié dans leurs bras – à moitié car ils savaient qu’Axel possédait cette sorte de phobie des contacts étouffants – que ses cousins l’accueilleraient avec le sourire et des tapes amicales, puis qu’ils partiraient tous les trois dans la ville. Bizarrement, il était persuadé que s’il revenait, ça se passerait exactement comme ça. Presque comme s’il avait encore énormément de mal à faire le rapport avec les raisons de sa fuite, qui le condamnaient pourtant à ne plus y retourner.
Il violait l’intimité de Marek en lisant dans sa tête. Pourtant, il avait fait ça toute sa vie. Axel ne pouvait donc pas arriver à comprendre à quel point c’était mal et irrespectueux. D’autant plus que c’était les pensées des gens qui venaient à lui et qui s’imposaient d’eux même dans son esprit. En fait, son talent de télépathe ne fonctionne pas de manière très banale. Il n’entrait pas dans l’esprit des gens et ne pouvait pas fouiller à sa guise pour obtenir les informations qu’il désirait. Sa propre âme restait toujours ancrée en lui, incapable d’en sortir. En revanche, elle était une sorte d’aimant qui attirait les pensées, les images, les sons, les réflexions et les facultés mentales des autres personnes en lui. Ce même aimant était recouvert d’une barrière protectrice qui l’immunisait contre toute magie mentale et tout contrôle extérieur. Cette barrière fonctionnait dans les deux sens, car elle empêchait aussi les voix de s’en aller… Il se trouvait comme dans un espace clos, enfermé et coupé du monde extérieur avec d’autres ‘personnes’. Son malaise envers lui-même pouvait être compréhensible puisqu’il était d’un naturel claustrophobe.
Dans l’esprit de Marek, il voyait à quel point ce dernier luttait pour ne pas montrer ce qu’il avait sur le cœur. Et s’il savait que le schizophrène pouvait lire en lui comme dans un livre ? S’il pouvait se douter une seule seconde que ses émotions affectaient le tueur ? Qu’en ressentant la tristesse due à ce jour de noël dans le cœur de Marek, il avait un pincement au cœur. Que pouvait-il bien faire ? Il ne savait pas s’amuser et à chaque fois qu’il essayait l’humour, il s’arrêtait aussitôt par peur qu’un malheur n’arrive s’il se lâche un peu trop. Il n’avait jamais rit aux éclats de toute sa vie… Alors qu’est-ce qu’un coincé comme lui pouvait faire pour Marek ? Il se sentait légèrement perdu et surtout méchamment touché en voyant que le photographe avait pensé à lui pour noël. Est-ce qu’il devait essayer de lui faire comprendre qu’il en était ravi, ou bien ce serait trop se dévoiler ? Que diraient-les voix ? Allez, réveillons les, pour une fois qu’il demandait leur avis. Au moins une, juste pour savoir quoi faire. Et tandis que l’homme se concentrait à chercher en lui les parties de sa folie les moins atteintes, parce qu’il ne souhaitait pas entendre parler de cette histoire de pastèques et de melons que certaines s’amusaient sadiquement à lui rappeler, il coupa court sa recherche en sentant l’esprit de Marek s’alarmer.
Axel tourna aussitôt la tête vers les silhouettes lointaines avant de sentir le photographe l’agripper et l’attirer soudainement en lui. Eh bien croyez que Marek eut extrêmement chaud, parce qu’Axel l’avait déjà violemment agrippé aux bras et s’apprêtait par réflexe à le jeter à l’eau. Il l’aurait fait si l’esprit alarmé de l’étudiant ne l’avait pas stoppé dans son élan, et que ce dernier ne lui dise qu’il allait se faire tirer dessus. Voilà pour la première réaction. Les conséquences furent pires pour lui, parce que les voix se réveillèrent, et pas qu’une seule. Il les sentait en totale panique dans sa tête à cause de ce contact rapprocher, et son cœur se mit à battre la chamade. Il lâcha maladroitement Marek et posa ses mains au sol en tournant la tête vers les silhouettes lointaines. Alors il y avait des Ashley bis qui se mettaient en traque un soir de noël ? Quoiqu’il en soit, Axel comprit rapidement qu’on en avait après lui, parce que d’après ce qu’avait dit le photographe c’était lui qu’on visait. En parlant de ça… Est-ce que Marek venait de lui sauver la vie ? Axel n’était pas fichu d’y réfléchir à cause de la proximité qu’il y avait entre cet homme et lui. C’était encore plus troublant que l’idée d’être visé par des tireurs expérimentés, apparemment. Il s’éloigna de quelques centimètres et se sentit reprendre le contrôle de lui-même. S’ils restaient allongés, ils allaient se faire tirer comme des lapins.
« Dans le bateau à trois. » murmura-t-il en fixant l’horizon. Au bout de trois secondes, il se leva précipitamment en agrippant le bras de Marek puis il courut précipitamment vers la grosse chaîne d’amarre avant de sauter du petit ponton et d’atterrir sur le bateau. Des coups de feu retentirent mais heureusement c’était plus difficile quant on est loin d’atteindre une cible en mouvement. Une fois qu’il eut entraîné Marek avec lui derrière la cabine du navire, l’homme ouvrit un bouton de son manteau et fourra la main à l’intérieur pour en sortir un de ses silencieux. Il le chargea et le garda bien en main avant de tourner la tête vers Marek. Il ne savait pas quoi lui dire et étrangement, se sentir en danger l’apaiser déjà plus que la situation dans laquelle il était quelques secondes plus tôt. Le tueur réussissait à garder son sang froid sans trop de mal. « Je suis désolé… C’était pas prévu. »
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| | | Marek d'Alembert
* * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * Le mec aux mille visages
Messages : 4735 Date d'inscription : 15/04/2010 Localisation : Au port, à regarder la mort entre les vagues.
| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Lun 27 Déc - 22:14 | |
| [C'est toi, le fantastibuleux. Pardonne-moi pour le délais...] Marek ne se doutait aucunement qu'Axel était capable de savoir toutes les pensées qui lui traversaient l'esprit et c'était probablement mieux ainsi. Le jeune homme était généralement très à l'aise avec tout le monde, mais c'était bien parce qu'il pouvait choisir ce qu'il montrait et ce qu'il cachait. Et il en cachait beaucoup. Marek aimait jouer différentes versions de lui-même selon les personnes et les situations, et pas seulement en se servant de son pouvoir magique. Il mentait souvent, mais il était encore plus doué lorsqu'il s'agissait de dissimuler, de ne rien dire pour ne pas mentir, de se donner une fausse bonne conscience. Pendant longtemps, par exemple, il avait omis de mentionner à son ami Nathan son attirance pour les hommes, parce qu'il ne croyait pas que l'autre jeune homme prendrait positivement ce type de penchants. Il ne lui avait jamais dit n'aimer que les femmes, mais il avait toujours tourné ses paroles de manière à laisser croire que c'était le cas. Marek agissait souvent de cette façon pour camoufler ses défauts, ou ce qui pouvait passer pour des défauts aux yeux des autres. Il aimait être lui-même...partiellement. Chaque personne méritait sa part de mensonge et il ne se gênait pas pour en servir à tout le monde. Certaines de ses relations avaient même été exclusivement basées sur des illusions. Avec Sara, il avait essayé d'être lui-même, mais il s'était caché sous une autre identité, un faux visage, une fausse histoire... Maverick lui avait semblé être tellement mieux que lui qu'il avait même envisagé, pendant un temps, de faire disparaître sa vraie identité pour ne rester que lui, pour toute sa vie. Un mensonge confortable, une illusion protectrice... Une cachette pour se mettre à l'abris des vérités douloureuses. Marek d'Alembert ne savait pas comment être complètement vrai. Peut-être ne l'avait-il jamais été, avec personne, de toute sa vie. Quand il se regardait dans un miroir, il reconnaissait son visage, parce qu'il était devenu expert dans les apparences. Pour le reste, rien n'était jamais certain à propos de l'homme qui se tenait devant lui, à la surface de la glace. Lui-même ne savait plus exactement qui il était. Bien sûr, les traits évidents de sa personnalité ressortaient facilement, comme sa tendance à la séduction et sa confiance en lui assez démesurée mais, pour le reste, c'était très flou. Il avait fini par perdre un peu de lui-même dans chaque mensonge qu'il avait décidé de vivre. Certains diraient que c'était bien fait pour lui... Marek préférait éviter d'en être vraiment conscient. Il avait choisi de vivre comme si les regrets n'étaient que pour les autres. Il s'enîvrait de plaisirs en tous genres pour éviter de réfléchir à qui il était et à combien il blessait les gens qui osaient l'aimer un peu trop fort. Marek avait choisi les plaisirs fugaces, les joeis éphémères. Il s'était créé un tourbillon de douces folies pour ne s'attacher à personne et ne pas sembler disponible ni sérieux. Il lui semblait même qu'il avait trouvé une sorte de bonheur dans sa nouvelle vie, depuis qu'il avait quitté l'hôtel. Mais chaque moment d'intense solitude venait raviver la brûlure du vide qu'il avait décidé de creuser autour de lui. Toutefois, plus personne ne toucherait son coeur... Trop de gens s'y étaient empoisonnés.
Marek avait quitté l'Europe dans l'espoir de changer. Changer de vie, de comportement, d'environnement...Changer lui-même. Il avait crû y arriver, mais il avait fini par comprendre qu'il ne serait jamais un autre que celui qu'il n'avait pas pu enchaîner à son ancien continent. Il avait traîné avec lui tous ses défauts, tous les travers qui le faisaient blesser tous ceux qui s'approchaient de lui. Il ne pouvait s'empêcher de faire du mal à ceux qu'il aimait ou qu'il avait aimés. Marek pouvait accomplir de grandes et belles choses, mais il se savait capable des pires bassesses. Il n'éprouvait, chaque fois, qu'une demi-culpabilité. Il arrivait à vivre normalement et, souvent, à répéter ses pires erreurs mais, le soir, lorsqu'il se retrouvait seul, les remords venaient l'assaillir avec violence. Si, le jour, avec d'autres personnes, Marek d'Alembert pouvait vous sortir le sourire le plus charmeur d'une manière totalement crédible, ses nuits solitaires étaient étouffantes. Il semblait que toutes ses erreurs se bousculaient pour revenir frapper sa conscience. Et il n'y avait personne pour le calmer, ces soirs-là. Pourtant, le lendemain, quiconque le croisait avait droit au Marek des bons jours, le séducteur un peu énervant qu'on ne pouvait pas ignorer.
C'était en grande partie par crainte de passer un Noel à culpabiliser dans le noir que Marek avait choisir de rester plus longtemps à marcher dehors, malgré sa haine du froid. Il détestait rester seul avec lui-même. Son projet initial de la soirée avait été de rentrer et de boire suffisamment pour perdre conscience de qui il était. Cette solution était souvent celle qu'il choisissait, car il détestait quand les larmes lui venaient et qu'il ne savait plus comment respirer sans avoir mal à un endroit impossible à déterminer. Axel l'avait sauvé d'un réveil difficile sur le sol de son salon, entre les bouteilles vides et la télévision encore allumée, le genre de réveil qui lui arrivait beaucoup trop souvent.
Le décor bascula et Marek eut le souffle coupé lorsque son dos frappa le sol. Il sentit les mains d'Axel serrer ses bras et il mit sa réaction sur le compte de la surprise. Après tout, il venait de le tirer vers le sol. Étrangement, Axel le prit au sérieux lorsqu'il lui dit dans quel type de pétrin ils se trouvaient. C'était plutôt étonnant, si on considérait que des problèmes du genre n'étaient pas très communs. L'autre homme décolla son corps du sien et Marek s'aperçut qu'il avait oublié de respirer. Probablement la panique due au danger. Il essaya, d'ailleurs, de ne pas tenir compte du fait qu'il avait complètement arrêté d'avoir froid pendant le bref moment durant lequel Axel avait été si près de lui.
« Dans le bateau à trois. »
Marek inspira profondément avant de suivre Axel rapidement. Il entendit une balle siffler beaucoup trop près de lui à son goût, mais aucune ne le toucha. L'homme fixa le silencieux d'Axel pendant quelques secondes, mais il jugea qu'il était préférable de remettre ses questions à plus tard. À contre-coeur, il passa sa main dans son dos pour prendre son propre pistolet en détournant le regard avant de lever à nouveau les yeux avec un air à la fois amusé et grave.
« À croire que toute la ville doit s'armer pour sortir la veille de Noel. »
Autant faire un peu d'humour... La situation n'en était pas moins grave, cependant. Ils se retrouvaient tout de même piégés dans un bateau qu'ils ne connaissaient pas avec des tueurs professionniels à leurs trousses.
« Je suis désolé… C’était pas prévu. »
« Ah non? Et moi qui croyais que c'était ton activité favorite du réveillon, la course extrême aux cadeaux.»
C'était plus fort que lui, dire des conneries quand il était nerveux.
« Où peut être situé le poste de commandes? On pourrait essayer de démarrer ce truc. » |
| | | Invité
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Mer 29 Déc - 13:01 | |
| La proximité entre Marek et lui était bien trop préoccupante pour qu’Axel se focalise sur le danger. Il mit quelques secondes avant de bien se rendre compte de la gravité de la situation, quoiqu’il considère leur corps presque collés bien plus grave. Vouloir ce genre de contact avec cet homme c’était prendre le risque d’être frappé ou bousculé. Ce n’est pas qu’il ne le voulait pas, c’est qu’il ne le pouvait pas. Les gestes tendres, caresses ou enlacements avaient l’effet d’une vive brûlure sur sa peau. Il avait l’impression qu’une main posée sur son épaule lui irritait la peau comme du sable collé sous le T-shirt. Ce désagrément suprême provoquait des réflexes agressifs chez lui et il se sentait comme un animal menacé qui devait montrer les crocs pour chasser les mains humaines. Le photographe avait réellement failli se retrouver dans l’eau à cet instant, et ce n’était pas tant le fait que son esprit soit en alerte qui avait arrêté à temps le réflexe violent d’Axel, mais aussi la sensation d’irritation bien différente qu’il avait ressenti dans la neige. En plus de lui brûler la peau, il avait eu le souffle coupé et les nerfs à vifs en lui. Il est clair que sous une telle surprise, il aurait mis beaucoup plus de force qu’à l’ordinaire pour repousser ce contact. Heureusement il n’eut pas le loisir de s’attarder sur le pourquoi de ce phénomène, car il se retrouvait en train de sauter sur ce bateau, reprenant ses esprits. Il passa une main dans ses cheveux de manière un peu désemparée, non pas pour les ennuis dans lesquels ils étaient tous les deux, mais parce que ces satanés voix dans la tête ne cessaient de lui hurler à quel point il devait avoir mal à cause de ce contact. Et cet effet psychologique se répertoriait sur son corps, car il sentait de désagréables sensations de frottements au niveau de son torse. Il s’immobilisa derrière la cabine de son bateau, rassurant ses bras par la prise en main de son arme à feu. Ce décor idyllique du paysage enneigé se transforma en la brume épaisse et dangereuse d’une situation qui vire au cauchemar. Ces flocons enneigés devenaient des projectiles meurtriers qui agressaient sa peau comme la balle d’un fusil. L’étendue blanche passait de la couverture soyeuse à une espèce de plaque de verglas empêchant toute course poursuite. Axel frotta son dos contre la cabine à la manière d’un ours, comme pour se débarrasser de « ces résidus de contact » qu’il sentait toujours sur son corps. Il ne put réfréner un frisson qui secoua le haut de son corps mais n’y fit pas attention car la sensation se calmait. Difficile de bien se concentrer lorsqu’il sentait ses troubles obsessionnels lui pourrir constamment la vie.
Le cliquetis d’un autre chargeur attira son attention et il étudia l’arme de Marek. Axel darda ses yeux sur le photographe pour le sonder, sachant que si Marek l’avait remarqué, il allait forcément penser à la raison pour laquelle il possédait une arme à feu. Le télépathe le fixa donc pour capter les réponses aux questions qu’il ne voulait pas poser à haute voix. Une fois qu’il eut ce qu’il voulait, il détourna le regard vers l’horizon en haussant les épaules pour simple réponse à la première remarque de Marek. En revanche, lorsqu’il s’excusa, il tourna vers lui des yeux beaucoup plus réprobateurs. Qu’est-ce que ça voulait dire, ça ?
« J’ai une tête à m’attirer des emmerdes ? » lâcha-t-il d’une voix basse et sèche. Il se retint d’ajouter le petit « moi », à la fin de sa phrase qui aurait clairement signifié le fond de sa pensée. Parce qu’il était clair que Marek était bien plus du genre à s’empêtrer dans des situations délicates qu’Axel, malgré le métier de ce dernier. L’assassin n’était cependant pas en colère, et il pencha la tête sur le côté pour risquer un coup d’œil en arrière suite à la proposition de son ami. Il ne savait pas spécialement conduire un navire, mais avait déjà accompagné sa patronne dans une mission où elle avait volé un bateau. Enfin le terme voler était peut-être un peu fort, puisqu’ils en avaient massacré les propriétaires donc il n’appartenait plus à personne. Axel préféra ne pas s’attarder pour éviter le ‘head shoot’. Cependant il n’aperçut personne. En revanche il sentait toujours leur présence, et s’il se concentrait dessus, il comprenait facilement qu’il y avait deux snipers immobiles et voyants clairement à travers le brouillard dans le visage. Ils étaient accompagnés d’hommes qui les protégeaient. Le petit groupe guettait patiemment que se découvrent leurs deux cibles… Leurs deux cibles ? Le schizophrène tourna les yeux vers Marek. Les pensées de leurs poursuivants avaient du mal à bien rentrer dans sa tête à cause de la distance, cependant il avait la très nette impression qu’il n’était pas le seul visé dans cette affaire, et que l’arme de défense de Marek se justifiait tout aussi bien que celle du tueur personnel d’Ashley.
« Oui. Essaye de couper la corde qui retient le bateau sans te montrer. » finit-il par répondre en coupant court à ses réflexions pour se focaliser uniquement sur ce qu’ils devaient faire pour se sortir de là. L’homme se concentra sur les pensées qu’il arrivait à focaliser et surtout sur leurs intentions. Il avait un certain avantage comme celui de savoir quand il serait repéré, de capter l’intention d’un des deux snipers d’appuyer sur la gâchette. Peut-être n’aurait-il pas le temps d’agir cependant, peut-être que si… Il se tourna, face au mur de la cabine, puis il s’appuya sur l’objet de fer qui servait à tenir les cordages avant de se hisser au niveau des fenêtres de la cabine. Heureusement, à ce niveau, il n’était pas dans l’angle. Il frappa la vitre avec la crosse de son arme plusieurs fois, ayant du mal à garder l’équilibre avec un pied sur le petit objet et l’autre cherchant une prise dans le mur de bois. Mais le gel sur les carreaux facilita grandement la tâche, et il finit par les fissurer et enfin les briser. Il se dépêchait au cas où leurs poursuivants s’approcheraient. L’homme continua de donner des coups sur les morceaux de verres menaçants, cependant il ne pouvait pas se permettre de prendre le temps de tout déblayer. Il finit donc par sauter, s’agripper au rebord et se hisser avec assez de force pour ne pas tomber en arrière. Il tomba en avant, laissant un gros « boum ! » retentir lorsqu’il se vautra sur le sol dans la cabine. Il posa les deux mains au sol, ayant eu le réflexe de mettre son bras droit en avant et de rouler pour ne pas se faire mal, puis il releva la tête. La pièce était toute petite et s’il n’y avait pas cette fenêtre cassée, sa claustrophobie se serait déjà manifestée. Heureusement la brise glaciale ne cessait de lui rappeler qu’il n’était pas enfermé, que tout allait bien. Il se mit à genoux afin de rester bien en dessous des vitres donnant sur le port, avant de grimacer. Une vive douleur venait de se réveiller au niveau de ses côtes à gauche et de l’une de ses cuisses du même côté. Il pencha la tête pour regarder et se rendit compte que du sang coulait au niveau de ses deux parties. Un bref coup d’œil en l’air coupa court à ses interrogation et il aperçut par l’entrée où il était passé ce morceau de verre qu’il n’avait pas vu et qu’il n’avait pas enlevé, survivant de la vitre brisé et recouvert d’un liquide rouge qui coulait lentement à l’extérieur de la cabine.
L’homme décida de reporter les soins à plus tard et il se reconcentra sur les commandes qu’il avait maintenant sous les yeux. Il prit ses clés de voiture et de maison, et enleva ses gants afin d’arracher ses clés, de les jeter sur le sol, et de dérouler ce qui servait à les assembler pour obtenir un fil de fer. L’homme enfourna l’objet dans la serrure afin d’essayer de faire démarrer le bateau, toujours à genoux devant le tableau de bord. Il ne faisait pas attention à ce qui pouvait se passer à l’extérieur, mais il espérait sincèrement que Marek réussisse à détacher le bateau de l’amarre. Cela dit, ce qui perturbait le plus Axel, c’était d’avoir laissé son ami à l’extérieur. Peut-être aurait-il dû lui demander de se hisser dans la cabine à sa place ? Il s’était imaginé qu’il y avait plus de fenêtres et que c’était plus exposé au danger. Il espérait réellement qu’il ne soit rien arrivé à Marek, et qu’ils s’en sortent tous les deux… Comme pour lui donner un peu d’espoir, le bruit d’un moteur qui se met en route retentit à ses oreilles et il tira à lui un gros levier en espérant que l’engin démarre et s’en aille du port.
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| | | Marek d'Alembert
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Mar 11 Jan - 14:03 | |
| Même s’il n’en parlait pas et même s’il n’y pensait pas concrètement la plupart du temps, Marek était parfaitement conscient qu’Axel était différent du commun des mortels. Avec le temps, le jeune homme avait développé un don assez impressionnant pour décoder les comportements des gens. Son talent pour séduire était en grande partie dû à sa pratique de l’analyse des moindres gestes et regards des autres personnes. Il avait appris, dès son enfance, à deviner l’agressivité ou le doute, par exemple, car sa grand-mère l’avait formé à apprendre à mentir et à gagner facilement la confiance des gens pour qu’on croie tout ce qu’il avait bien envie de dire. Ainsi, il savait généralement si on le croyait ou non et s’il devait faire plus d’efforts pour qu’on lui fasse confiance. Le temps et la pratique lui avaient permis d’apprendre à deviner une multitude d’autres sentiments, émotions et impressions que le genre humain pouvait ressentir. Ce n’était ni une intuition grandiose ou un talent venu du ciel, mais bien une aptitude acquise, au départ, grâce aux enseignements de sa grand-mère et qu’il avait perfectionnée au fil des années. Marek avait donc compris, à force de côtoyer Axel, que celui-ci éprouvait certains problèmes pour vivre comme une personne normale. Il n’en avait pas saisi l’ampleur, mais il commençait à se douter que l’autre homme avait une manière étrange de percevoir le monde qui l’entourait et, surtout, les gens qui s’approchaient de lui. Marek avait remarqué, à quelques reprises, qu’Axel semblait paniquer dès qu’une personne le touchait, que ce soit voulu ou par accident. Avec une autre personne, le séducteur aurait probablement provoqué quelques contacts, pour essayer de mieux comprendre et, même, pour s’amuser un peu. Seulement, sans qu’il ne puisse s’expliquer pourquoi, il n’avait pas envie de brusquer Axel ou de lui faire peur. Parce qu’il était persuadé que l’autre homme avait peur de quelque chose; et il avait décidé qu’il finirait bien par trouver ce que c’était.
Marek détestait se balader constamment avec une arme, mais il n’avait pas d’autre choix depuis qu’il travaillait secrètement pour une association de nettoyage du crime de San Francisco. Éliminons la violence par la violence. Les humains ne cesseraient jamais d’être cons. Marek tirait plutôt bien, pour quelqu’un qui n’utilisait les armes à feu que depuis quelques mois. On l’avait entraîné pour qu’il n’ait pas à compter que sur son pouvoir magique et, désormais, il savait même quelques notions d’arts martiaux, même s’il n’appréciait pas trop d’échanger des coups. S’il devait se défendre, il préférait encore sortir son pistolet que frapper directement son opposant. Son arme favorite restait tout de même son pouvoir magique. Il pouvait se transformer complètement ou partiellement, modifier sa consistance, s’envoler… C’était justement son pouvoir et sa grande maîtrise de celui-ci qui avait amené cette association à s’intéresser à lui. L’un de leurs membres avait comme pouvoir magique de sentir et voir la magie des autres sorciers et créatures et de l’analyser. Le don de Marek avait impressionné ceux qui l’avaient recruté et le jeune homme avait été bien intéressé à faire partie de leur association. Il avait toujours eu besoin de sensations fortes et, maintenant qu’il s’était promis d’éviter l’amour, il avait dû trouver d’autres manières de se sentir en vie. Le danger de mort des missions et l’impression d’être utile l’avaient attiré. Il n’avait rien à perdre, après tout, et son pouvoir le faisait se sentir invincible. D’ailleurs, il se savait protégé de bien des dangers par ses employeurs. Cette association n’était pas comme les groupes de truands de la ville. On se soutenait et chaque membre comptait vraiment. L’esprit de chacun était bloqué par un puissant sortilège empêchant même les plus puissants télépathes d’y trouver des traces de l’existence de cette association. Les autres pensées pouvaient être captées, mais tout ce qui concernait l’association était imperceptible.
Les yeux de Marek rencontrèrent le regard réprobateur d’Axel et il comprit que ce dernier n’avait pas capté la que c’était une blague. Une petit sourire en coin se dessina sur son visage alors qu’il répliquait d’une voix vaguement amusée : « C’était de l’humour, Axel. »
Marek repéra la corde dont parlait Axel. Sans se montrer? Comment pouvait-il aller jusqu’au bout du bateau sans être visible? Il envisagea de se transformer en n’importe quoi de blanc, pour se fondre dans le paysage, ou en quelque chose de très petit, mais il ne voulait pas dévoiler son pouvoir. Il n’avait pas envie de le montrer à Axel, parce qu’il détestait l’idée elle-même, mais laisser voir son talent assez spécial à leurs ennemis l’inquiétait beaucoup plus. Si les deux hommes sur le bateau étaient en situation précaire, ceux qui devaient maintenant les avoir entourés risquaient bien moins. Même si Marek et Axel s’en sortaient, il y aurait au moins un survivant de l’autre côté pour aller raconter ce qu’il avait vu. Et Marek adorait avoir des petits secrets. Il courut donc jusqu’à l’endroit où était attachée la corde et, en réalisant qu’il n’avait rien pour la couper, il eut un moment de panique. Puis, il réalisa qu’il venait d’être très con. Subtilement, il enleva un gant et transforma sa main en une étrange main métallique et tranchante. Au bout de quelques minutes pendant lesquelles il s’efforça de ne pas rester en place assez longtemps pour laisser quiconque de le viser correctement, il vint à bout de la corde. Rapidement, il transforma à nouveau sa main et il remit son gant en se rendant vers ce qu’il devinait être le poste de commandes.
Un grondement réconfortant s’éleva du navire et Marek fut soulagé de savoir qu’Axel avait réussi à le démarrer. Avec tout ce bruit, s’ajoutant à celui du vent qui ne se lassait pas de lui siffler dans les oreilles, le jeune homme n’entendit même pas le bruit de la balle. Incrédule, il baissa les yeux pour constater que son épaule gauche saignait. Sa première pensée fut plutôt condescendante : Avaient-ils affaire à des amateurs? Une épaule! Un tireur professionnel aurait visé la tête, non? À moins qu’il n’ait préféré le cœur… La douleur fit oublier à Marek son arrogance et il porta son autre main à son épaule pour y effectuer une pression. Surtout, ne pas penser à la douleur et se concentrer à empêcher le sang de couleur. Il était maintenant tout près de la cabine et il s’appuya sur un mur de celle-ci pour crier à Axel de quitter le port : « La corde est coupée. On peut se tirer d’ici. »
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Sam 15 Jan - 15:35 | |
| De l’humour, de l’humour, il allait bien finir par comprendre que le schizophrène n’avait pas d’humour ! Il avait bien du mal à comprendre ce qui pouvait être drôle dedans et, même après la dernière réplique de Marek, n’afficha pas un seul sourire. L’homme pouvait parfois être d’un ennuie particulièrement mortel. Il préféra se concentrer sur ce qu’il avait à faire plutôt que d’essayer de comprendre comment raisonner Marek, pour l’accuser de ça à un tel moment ! Ah non, c’est vrai, pardon, il ne l’accusait pas puisque c’était de l’humour. Quelle différence ? L’ironie ne sert qu’à dire la vérité tout en se voilant derrière un rire. Qu’il remette ça sur la faute de l’humour, il n’empêche qu’il l’avait dit, et donc qu’il le pensait. Mais le pas-drôle ne s’y attarda pas, en fait il s’en fichait complètement. Il connaissait le pouvoir de Marek. Il l’avait déjà vu faire et, s’il n’avait jamais eu l’occasion de lui prouver qu’il pouvait le reconnaître sous n’importe quelle forme, il savait de quoi l’homme était capable. En lui demandant d’aller couper cette corde, Axel s’était imaginé que le métamorph se muterait en un petit animal comme le castor, afin de couper l’objectif avec ses dents sans se faire tirer dessus par les ennemis. Mais alors que le tueur essayait de bidouiller le contact avec le bateau pour faire démarrer ce dernier, un coup de feu retentit. Il s’en est fallu de peu pour qu’il n’ouvre pas la porte de la cabine et se découvre pour se précipiter sur Marek. Il s’était déjà relevé, prêt à sortir, mais la voix de son ami lui parvint, signe qu’il n’avait rien. Soulagé, et se demandant pourquoi son cœur lui martelait ainsi la poitrine comme s’il avait frôlé la crise cardiaque, il se reconcentra sur sa mission. L’assassin tira le levier à lui, et il sentit toute la machine démarrer et s’éloigner du port. Est-ce qu’il avait le mal de mer ? Il n’allait pas tarder à le savoir. Axel espérait que Marek se soit de nouveau caché derrière la cabine en attendant que le bateau s’éloigne. Une fois que le navire sortit du port, il sortit son arme et tira dans le verrou de la porte avant de l’ouvrir d’un grand coup de pied. Il donnait l’impression de sortir tout droit d’un commando, il ne lui manquait plus que la mitraillette sur l’épaule et il aurait été pris pour un lieutenant de l’armée. Ah, l’armée. Si Axel n’avait pas été pris par Ashley, il se serait engagé dans l’armée sans hésitation. Là, il pouvait canaliser tous ses problèmes sans trop gêner autrui. Sans trop se gêner lui-même d’ailleurs. Il n’avait pas à réfléchir dans l’armée, il se contentait de suivre les ordres et c’était tout ce qu’il souhaitait.
Une fois la porte fracassée mais ouverte, parce qu’il n’allait certainement pas faire passer Marek par la fenêtre, il ramassa ses clés sur le sol et rangea son arme. L’homme ressentait une vive douleur sur son bras et sa cuisse, mais il passa sa veste par-dessus pour que ça ne se voie pas. Et puis c’était largement supportable, des entailles peut-être profondes mais il s’en occupera une fois rentré et ce sera bon. « Bien joué. » fit-il en se dirigeant vers la silhouette de Marek étrangement adossée au mur. Axel pencha la tête sur le côté pour l’observer, comprenant bien vite que quelque chose n’allait pas. Il ne perdit pas le temps et sonda la tête de son ami avant de faire le rapprochement avec le coup de feu : Il était touché. L’assassin vit l’épaule du photographe saigner, il serra la mâchoire. Il savait bien qu’il n’aurait pas dû l’envoyer là-bas ! Il aurait mieux fait de lui ordonner de rester planqué, de faire avancer le bateau dans le cockpit et de se précipiter ensuite dehors pour couper cette fichue corde, quitte à se faire plomber. Sans un mot, le schizophrène s’empara du bras intact de son ami et l’entraîna presque de force dans la cabine avant de le lâcher brusquement pour refermer la porte, ou du moins essayer, derrière eux. Il s’efforçait de ne pas boiter et y parvenait plutôt bien heureusement. Il se retourna et commença à fouiller l’endroit, se disant qu’il devait forcément y avoir une trousse de soin quelque part. Son regard était devenu sombre depuis qu’il avait vu le sang sur Marek. (Déjà qu’il n’était pas très gai à l’accoutumée.) Il ne s’encombrait pas des habituelles questions « ça va » ou « t’es blessé » puisqu’il avait toutes les réponses qu’il souhaitait dans la tête de son dernier. Fouiller, c’est le mal, mais il s’en fichait parce que tout ce qui lui importait était de guérir cette plaie. Tout ce qu’il trouvait pour le moment c’était de l’alcool de marin, des boissons fortes et faites pour tenir contre le froid généralement. Axel jetait les bouteilles au ras du sol pour ne pas qu’elles se cassent et pour pouvoir chercher plus profondément. Il en garda juste une avec lui, lui confiant la mission de désinfecter si toutefois il trouvait du tissu pour le faire. Heureusement, il finit par mettre la main sur une trousse de secours cachée dans l’une des trappes de la cabine. Il soupira intérieurement en sortant l’objet puis l’ouvrit. Il se releva et jeta en même temps un coup d’œil par la vitre qui montrait l’horizon. Il poussa le levier en sens inverse, se disant qu’ils étaient assez loin et qu’il valait mieux arrêter la machine s’ils ne voulaient pas foncer dans une falaise. Tout ce qui ne lui paraissait pas utile, il le jetait sur le sol comme s’il était pressé. Il finit par sortir une sorte de grosse pince en fer avec des bandages. Il posa le tout sur le cockpit et adressa enfin la parole à Marek.
« Assieds-toi. » ordonna-t-il en regardant la pince qu’il avait dans la main. Marek pourra bien dire ce qu’il veut, Axel ne lui foutra pas la paix tant qu’il n’aura pas retiré la balle de son épaule. L’assassin pouvait être têtu lui aussi, bien qu’il le soit toujours moins que son ami.
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| | | Marek d'Alembert
* * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * Le mec aux mille visages
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Lun 17 Jan - 23:02 | |
| Marek n’avait pas l’habitude de côtoyer des gens sérieux. En fait, en dehors de sa famille, il ne s’était toujours trouvé proche que de personnes qui savaient apprécier l’humour. Ses parents, eux, n’avaient jamais pensé que le rire valait la peine de secouer leur si confortable attitude noble. Ils n’étaient pas seulement sérieux, ils étaient ennuyants et conventionnels. Rien n’avait d’importance en dehors de leur petite vie bien rangée et parfaitement idéale. Si leur fils n’avait pas eu cette tendance à être dérangeant et à sortir du cadre bien rigide dans lequel le reste de la petite famille se sentait si à l’aise, les d’Alembert n’auraient probablement pas accepté qu’il parte pour l’Amérique. Eux-mêmes trouvaient à redire sur toutes les décisions importantes des autres familles et ils auraient craint qu’on ne juge leur aptitude à être parents en apprenant que leur unique enfant s’exilait sur un autre continent. Cependant, éloigner de leur vie tranquille la petite tornade qu’ils avaient mise au monde leur avait semblé une sage idée et ils avaient encouragé Marek à aller vivre son aventure au bout du monde.
Le jeune homme ne désespérait pas, sinon d’apprendre l’humour à Axel, d’au moins lui faire comprendre comment le repérer. La vie était moins dure quand on en riait un peu. Néanmoins, il savait que ce ne serait pas une tâche facile : l’autre homme semblait très loin d’être un pur comique. Heureusement, Marek d’Alembert n’abandonnait pas facilement. Axel finirait par, au moins, sourire à ses blagues.
Foutues armes à longue portée. Les fusils de petit calibre avaient de bien qu’on devait être près d’un tireur pour se faire trouer le corps. Les tueurs emmitouflés dans le blanc du port pouvaient se blottir entre les flocons, à des centaines de mètres de là, et continuer à être une menace. Même quand on faisait très attention. Marek ne comprenait pas comment il avait pu ignorer le son du tir. Peut-être que la douleur l’avait assourdi, un instant. Il n’y avait bien que dans les films d’actions et dans les jeux vidéos que les gens, bons ou méchants, pouvaient se prendre plusieurs balles et continuer à courir. Les héros se faisaient frapper cinquante fois et leur ardeur redoublait contre leurs assaillants. Foutaises. Marek était allé se vautrer contre le mur de la cabine, dès qu’il avait pu, soulagé de s’être trouvé un appui, et il ne s’était pris qu’une seule balle. Non, il n’était pas dans un film. Le danger était réel.
Lors de ses missions pour la petite association pour laquelle il travaillait, Marek avait eu l’impression de participer à une sorte de jeu. Se cacher, observer, attendre le bon moment... La douceur féroce de l’adrénaline quand il avait senti le danger murmurer sa présence dans l’air autour de lui. Il ne risquait rien, il était invincible. Il était comme les héros du cinéma, ceux qui triomphent d’ennemis trois fois plus nombreux sans une égratignure. Seulement, ce soir, avec sa blessure à l’épaule, il aurait paru moins impressionnant au grand écran. La réalité venait de le plomber.
L’autre homme entraîna Marek dans la cabine et ce dernier le suivit docilement en souhaitant que leurs assaillants n’aient pas la brillante idée de voler, eux aussi, un bateau. Il se sentait franchement moins utile, depuis que chaque respiration lui rappelait douloureusement le trou dans son épaule. Il regarda Axel fouiller la cabine, jetant sur le sol tout ce qui devait être inutile et, naïvement, il se demanda ce qu’il faisait. Quand il remarqua l’alcool, Marek comprit que son ami ne comptait pas le boire et il anticipa déjà la brûlure sur sa blessure, mais il était conscient que c’était nécessaire. Toutefois, la vue des pinces lui inspira franchement moins confiance.
« Tu ne me touches pas avec ces pinces sans que j’aie d’abord vu ton diplôme de chirurgien. »
Sa remarque fut accompagné d’une grimace à mi-chemin entre l’horreur et le sourire. La balle le torturait assez pour qu’il s’avoue qu’il ferait presque n’importe quoi pour qu’elle disparaisse, mais l’instrument d’Axel ne lui semblait vraiment pas être la situation idéale. Ces pinces étaient énormes. Vraiment énormes. Trop énormes. Peut-être qu’Axel voulait l’ouvrir au complet. Ou peut-être que Marek exagérait sa représentation mentale des pinces. Le transpercé du moment essaya de réfléchir à une autre solution, mais rien ne lui venait. C’était frustrant de se dire qu’il pouvait se transformer en presque n’importe quoi, mais que tous ces presque n’importe quoi n’avaient aucunement la faculté de faire sortir une balle de son corps. Les hôpitaux étaient tous trop loin et ils ne pourraient s’y rendre rapidement sans repasser par le port, ce qui n’enchantait pas particulièrement Marek. Et il commençait à avoir étrangement froid. Il n’avait pas le choix.
« D’accord, d’accord… Tu peux faire le boucher, mais seulement si tu me promets que ça ne fera pas mal.», grommela-t-il avec un sourcil levé et un sourire moqueur. Avec de la chance, Axel capterait la blague.
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Mer 19 Jan - 20:50 | |
| Ce n’était pas la première fois que l’on reprochait à notre cher mur de marbre son manque de gaité. Il n’avait jamais su apprécier à leur juste valeur les blagues, et ne savait détecter les traces d’humour qu’en lisant ce fait dans la tête d’autrui. Au fond, le comique n’était pour lui qu’une de ces nombreuses choses qu’il tentait en vain de comprendre, mais qu’il ne pouvait s’empêcher de voir comme une méthode lâche de se substituer à la réalité. Ses voix lui avaient toujours interdit de pratiquer l’humour, soit disant qu’il devait toujours garder les pieds sur terre et rester concentré sur ses agissements. Et puis il était en lui-même bien trop déconnecté du monde social pour se permettre ces petites folies du sourire. Axel était une sorte d’autiste avancé, paniquant lorsque ses habitudes sont changées, lorsque ses manies sont bouleversées et lorsque la situation lui échappe. Cependant, il savait se tenir lorsqu’il sortait ou qu’il était entouré de monde. S’il lui arrivait de péter un plomb en public et de foncer littéralement dans un lieu isolé pour attendre que la crise passe, il réussissait tout de même à se contenir et à ne pas exploser devant les regards indiscrets. Autiste était d’ailleurs noté dans son suivi psychologique, à côté de la notion de schizophrénie, de celle des troubles comportementaux et obsessionnels et enfin de toute la liste de ses phobies. Il arrivait d’ailleurs à l’homme de s’en découvrir une nouvelle et de désespérer. Il avait l’impression de vivre non pas dans un monde mais dans une jungle dangereuse où chaque recoin cache un danger. Les espaces cloîtrés n’étaient pour lui que des boîtes comprimant l’air et qui le faisaient étouffer. Les hauteurs n’étaient pas naturelles, elles lui donnaient la sensation de tourner, de tourner et de tourner encore jusqu’à perdre le sens de l’équilibre et de devoir garder la peur au ventre, le ventre contre terre. Il y a aussi le noir. Non pas la couleur mais le chaos qui régnait dans une pièce ou dans la nuit. L’obscurité qui lui donnait l’impression d’être enveloppé dans d’épais draps en cuir qui s’enserraient autour de lui. Et qui lui faisait entendre des bruits inquiétants, il avait l’impression d’être observé par des milliers de regards et enfin, l’obscurité était comme une atmosphère pesante qui s’abattait lourdement sur lui et qui l’écrasait tant il détestait ne rien voir. Il y avait à cela la peur des contacts, du ridicule, des clowns, des avions, de la foule, de la solitude, des trains, de la nudité, des forêts, des monstres, peur de la peur, peur qu’on lise toutes ces peurs en lui, peur de devenir fou… Il était aisé de comprendre qu’avec tout cela, l’homme ne soit pas du genre à se mêler facilement à un groupe et encore moins à une conversation.
Voir ce liquide rouge couler de l’épaule de Marek suscitait chez lui une étrange impression de panique blasée. Comme s’il avait échoué à une mission qu’il s’était inconsciemment donnée. Il ne pouvait pas se permettre de le laisser ainsi et encore moins de faire comme si de rien n’était. Il l’entraîna alors à sa suite. Ils s’en étaient pourtant sortis, ils avaient réussi à s’éloigner et le bateau était maintenant arrêté en pleine mer. Si leurs poursuivants décidaient de les prendre en chasse, ils auront le temps de voir venir leur navigue et de mettre les voiles ailleurs, s’ils avaient un moteur assez puissant. Mais qu’importe, ils s’étaient assez éloignés et aucune silhouette inquiétante ne se profilait dans l’horizon blanc. C’était étrange de voir ces flocons continuer leur descente, nullement dérangés par les coups de feu et la blessure d’un des participants. La nature ignorait royalement la condition humaine pour continuer son cheminement, ne se contentant que d’achever son œuvre que rien ni personne ne pouvait contredire. C’était à la fois rassurant et intimidant. Axel referma ce qui restait de la porte derrière eux. Il se sentait mal à la simple idée de savoir le photographe blessé, et ne pouvait rien dire là-dessus par peur de se trahir sur son inquiétude. Cependant, ses gestes s’occupaient de montrer clairement qu’il n’était pas rassuré et qu’il cherchait activement une solution à ce problème. Ses propres plaies pouvaient bien congeler qu’il s’en fichait éperdument. Marek était venu jusqu’à lui, avait décidé de passer son noël avec le schizophrène et avait bravé son aversion pour la neige afin de passer un peu de temps avec lui. C’était des faits qui touchaient Axel et qui revenaient sans arrêt dans la tête de ce dernier. Et lui, qu’avait-il à offrir à son ami ? Qu’avait-il bien pu pouvoir faire, un jour, pour lui ? Le tueur mit la main sur une bouteille d’alcool qu’il garda pour lui, avant de trouver le reste des instruments de torture. Il était inconcevable pour lui d’abandonner Marek. Il se dirigea vers ce dernier, montrant clairement les outils dont il s’était armé.
« Tu n’as pas le choix, de toute manière. » répliqua-t-il simplement en manipulant l’arme du supplice entre ses doigts. Il s’était déjà souvent soigné lui-même, mais n’avait jamais pratiqué sur quelqu’un d’autre. Il attendit que l’enfant cesse de faire son capricieux, Axel était de toute manière un être extrêmement patient. Une fois que Marek fut assis à même le sol, le schizophrène se mit à genoux devant lui et sortit un paquet de mouchoir de sa veste. Il imbiba un cleenex d’alcool et nettoya la pince avec. « Bien sûr que ça va te faire mal. » lâcha-t-il en fronçant les sourcils, ayant véritablement du mal avec l’humour, « mais ce sera pire si on ne retire pas la balle. » En espérant bien sûr que le plomb n’ait pas explosé en plusieurs fragments dans l’épaule de Marek. Auquel cas ce dernier allait bien plus douiller. Axel grimaça une fois à genoux car il sentit la douleur à sa cuisse le faire souffrir, alors que la plaie ouverte se congelait presque à cause du froid. Avec un peu de chance, si c’était le cas, il ne saignera plus. Il reprit un visage normal et ouvrit le manteau de Marek pour enlever le côté de l’épaule blessée. Il déchira ensuite un peu le tissu autour de la plaie pour découvrir cette dernière d’une manière beaucoup plus accessible. Avec deux mouchoirs, il épongea le sang autour comme il put sans appuyer, et pour mieux voir ce qu’il allait faire. L’homme ne prit même pas la peine de prévenir Marek avant de commencer la charcuterie. Le pouce et l’index de la main droite de chaque côté de la blessure, il eut du mal à garder cette position car son épaule droite était saignante elle aussi. Mais étant gaucher, cela ne l’empêcha pas de faire rentrer la pince et d’écarter le trou de Marek (HAHAHA ! Pardon.) afin de regarder à l’intérieur. Heureusement qu’il ne s’évanouissait pas à la vue du sang, parce qu’il serait déjà effondré sur le sol sinon. Alors que sa main droite s’était finalement plaquée sur la poitrine de son ami pour le coller contre le mur et l’empêcher de bouger, il rentra assez péniblement la pince dont les deux bouts étaient écartés pour voir au milieu. Il chercha durant de très longues secondes cette vilaine balle, mais finit par la retrouver sous une petite lueur argentée, facilement reconnaissable sous les muscles et les os. Il serra les embouts de la pince dessus et tira. Il dut s’y reprendre à plusieurs fois car elle semblait bien ancrée et ne voulait pas venir. À la fin il dut l’attraper avec les doigts et la retirer, entière, une bonne balle solide de sniper. Axel la regarda un instant avant de la jeter au sol avec la pince. Il vida son paquet de mouchoir et déversa de l’alcool dessus pour former une sorte de gros bloc blanc, qu’il compressa de force contre la blessure de Marek. Ça devait horriblement piquer, mais il fallait bien désinfecter ! Axel resta là, appuyant ce bandage de fortune contre la plaie de son ami en attendant que les saignements décident de cesser. |
| | | Marek d'Alembert
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Mar 1 Fév - 15:19 | |
| [Je suis une méchante personne de t’avoir autant fait attendre… Je sais. Mais tu m’aimes quand même.] Dès son enfance, Marek avait commencé à démontrer que rien n’était à son épreuve pour attirer l’attention. Tous les enfants de sa classe connaissaient son nom, et ce, la première journée. Il avait toujours eu besoin d’attention, que ce soit positivement ou négativement, et la retenue était une notion très abstraite pour lui. Avec le temps et, surtout, avec les enseignements de sa grand-mère, Marek avait appris à moins attirer l’attention et à contenir un peu son enthousiasme en public. Il avait développé plusieurs qualités que même ses parents appréciaient, comme l’art de réfléchir avant de parler, mais il avait toujours gardé au fond de lui sa tendance à aimer avoir l’attention sur lui. Bien sûr, il s’intéressait aux autres et il n’était pas complètement centré sur sa personne, mais il aimait bien se donner en spectacle et se créer une petit cour dans les lieux qu’il fréquentait. Par exemple, au bar où il travaillait à temps partiel, tous les employés et les clients habituels savaient qui il était. Plusieurs l’appréciaient et plusieurs autres le détestaient. Personne ne le connaissait vraiment, mais ce n’était pas très important. Marek n’avait pas quitté l’hôtel pour trouver d’autres personnes à décevoir.
Il y avait tout de même Axel. Qui était là. Qui ne s’éloignait pas. Qui le connaissait étrangement bien. De qui il se passait de moins en moins. Marek n’avait pas encore réalisé que son ami-pas-drôle avait une réelle importance pour lui car, s’il l’avait compris, le jeune homme aurait commencé à essayer de s’en éloigner doucement. Il avait blessé trop de gens pour risquer de détruire une personne de plus. Il avait essayé de changer, avec Christo, et on voyait bien où cela l’avait mené. Marek d’Alembert n’était pas fait pour être aimé. Point. Il n’y avait rien d’autre à dire. En quittant l’hôtel, il avait décidé de se contenter de la photographie et de relations éphémères. Toutefois, voyant que c’était trop peu pour une personne qui avait besoin d’émotions fortes, il s’était trouvé cet emploi où il risquait sa vie pour nettoyer la ville des criminels les plus odieux. Il avait l’air héroïque, quand on ne le connaissait pas, à prendre tant de risques pour aider des inconnus, mais son choix de travailler pour cette organisation était totalement égoïste. Le crime, il s’en tapait royalement. Une autre conséquence de son éducation par sa grand-mère… Elle lui avait appris que chaque personne pouvait se révéler bonne ou mauvaise, selon la situation, et qu’il fallait évaluer très consciemment les risques que représentaient les faiblesses de chacun avant d’accorder sa confiance. Aussi, l’homme ne jugeait jamais une personne comme bonne ou mauvaise. Un meurtrier apparemment insensible pouvait être le prochain sauveur de l’humanité ou, au minimum, celui qui épargnerait votre vie parce que vous lui avez laissé une chance. La petite fille toute mignonne, assise dans le bac à sable avec sa poupée, risquait d’être la prochaine Ashley Nortlen. Il ne fallait se fier à rien. Tout était variable dans le comportement humain. Bien sûr, certaines réactions étaient prévisibles, si on avait l’œil. Et Marek d’Alembert avait l’œil. Il se servait d’ailleurs de son talent pour analyser les gens lorsqu’il travaillait à débusquer des grands méchants. Il essayait de ne pas trop réfléchir à ce que lui avait appris sa grand-mère, pour ne pas se sentir coupable en les éliminant, et il se concentrait sur la sensation en elle-même. Risquer de mourir lui donnait l’impression d’être encore plus en vie et c’était exactement pourquoi il faisait ce travail. Sans émotions fortes, sa vie lui semblait vide de sens. Lorsqu’il travaillait, il sentait qu’il devait survivre pour gagner, pour se prouver qu’il était le plus fort.
Auparavant, Marek puisait ses émotions fortes dans l’amour, mais il s’était juré de tenir ce sentiment à distance désormais. Les conquêtes qui défilaient dans son lit n’étaient qu’un pale réconfort. Il ne voulait pas s’attacher et, si une de ses aventures se montrait trop intéressée, il trouvait un moyen de se faire détester. À ce stade, personne ne souffrait… Et la conquête suivante n’attendait que son moment de gloire.
Marek n’avait pas eu pour projet de se retrouver avec une balle dans l’épaule pour Noel, mais il ne s’en faisait pas trop. Ce n’était qu’une balle dans l’épaule, après tout. Il la préférait à cet endroit que dans un organe plus important et, d’une certaine manière assez tordue, cela l’amusait. La situation n’avait pourtant rien de très drôle, à première vue. Cependant, si on considérait que Marek s’était dit qu’il n’y avait rien de pire que passer Noel tout seul à s’ennuyer, le savoir maintenant atteint par une balle parce que des tueurs professionnels avaient essayé de le tuer était plutôt comique. Il faillit bien en faire la remarque à Axel, mais il se ravisa en se disant que son ami ne rirait probablement pas. Comme d’habitude.
Si l’homme avait crû que recevoir une balle était douloureux, c’était simplement parce qu’on n’en avait jamais ressorti une de son corps. Franchement, se faire tirer dessus était carrément agréable comparé à ce supplice. Néanmoins, Marek serra les dents et essaya de rester silencieux. Il ne ferait pas la gamine, tout de même. Le jeune homme se concentra sur une douleur plus douce que celle de la blessure : le froid. Axel avait dû ouvrir son manteau et un fin vent s’était infiltré pour frôler la peau de Marek de ses dents gelées. Entre la balle et l’hiver, le choix était difficile…
La balle émit une courte mélodie de défaite en heurtant le sol et Marek desserra un peu les dents en soupirant. Comment un si petit morceau de métal pouvait-il faire autant de mal? À bien y penser, s’il y avait un au-delà, les gens tués par balle devaient se sentir plutôt cons… Terrassés par un bout de métal qui peut tenir dans le creux d’une main. Le contact de l’alcool sur la blessure surprit Marek, qui avait oublié ce détail important, et il ne put retenir un gémissement étouffé. Il avait l’impression que sa blessure ne cesserait jamais de brûler. C’était horrible.
« Sois gentil et laisse-moi prendre une gorgée pour me détendre. », murmura-t-il, les yeux mi-clos. |
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Jeu 10 Fév - 9:49 | |
| Des échos de la douleur que ressentait Marek parvenaient à Axel. Il ne pouvait malheureusement rien faire pour atténuer la souffrance de son ami, si ce n’est se dépêcher de retirer cette pince de son corps. La main toujours plaquée sur la poitrine du photographe, il avait rapproché son visage de la blessure, concentré et plissant les yeux car il lui était difficile de bien voir ce qu’il faisait. Finalement, il réussit à retirer ce petit bout de métal et le jeta sur le sol comme s’il venait de retirer un cafard accroché au mur. Lâchant la pince, il prit le petit bloc de mouchoirs dans ses doigts ensanglantés pour l’arroser d’alcool et le compresser sur la plaie de son interlocuteur. Le gémissement de ce dernier rappela le manque de tact d’Axel, qui en profita pour appuyer davantage afin de faire cesser les saignements. L’odeur du sang lui tournait légèrement la tête, à moins que ce ne soit le fait qu’il soit blessé lui aussi ? Il fit plusieurs fois frétiller le bout de son nez, n’aimant pas beaucoup laisser ce parfum de vampire agresser aussi violemment ses narines. Il n’avait jamais aimé cette odeur et la vue de ce liquide primordial hantait une grande majorité de ses cauchemars. L’homme ne regarda pas Marek lorsque ce dernier lui demanda de l’alcool. Il lâcha la compresse de fortune d’une main et, de l’autre, entassa plusieurs autres mouchoirs pour former un nouveau bloc. Il prit la bouteille et en versa une bonne quantité dessus, avant de la donner à son ami pour le laisser boire à sa guise. Axel tournait et retournait la compresse pour en utiliser toutes les parties encore à peu près propres. Il épongea comme il le put les saletés autour de la plaie de Marek, puis il laissa tomber le petit tas de mouchoir pour prendre le deuxième qu’il avait préparé. Là, il appuya de nouveau sur la blessure de Marek, faisant couler de l’alcool sur les vêtements de ce dernier. Puis il garda une main dessus, appuyée, attendant que la blessure cesse de saigner. Le mélange du sang et de l’alcool offrait une odeur particulièrement repoussante, et il en éloigna son visage pour ne pas ressentir l’envie de vider son estomac. Car si l’on y rajoutait quelques reflux gastriques, l’atmosphère deviendra tout simplement invivable.
L’assassin eut un frisson soudain, suivi d’une douleur irritée au niveau de la cuisse et de l’épaule. Il avait l’impression qu’un glaçon avait pénétré dans ses coupures pour en geler les interstices. Il en venait même à appuyer du coude sur ses blessures pour provoquer de nouveaux saignements, afin que son sang réchauffe sa peau et empêche les plaies de glacer. Il se mordait la langue en même temps, trouvant cette souffrance désagréable et pire à chaque fois qu’il remuait le bras ou la jambe concernés. Il espérait avoir d’autres paquets de mouchoirs dans son manteau, afin de se désinfecter également. À force d’appuyer contre le trou de Marek, Axel finit par constater que l’hémorragie avait cessé, en retirant lentement la compresse. Il en déchira un morceau propre pour le réappliquer dessus et piocha dans la petite trousse un bandage qu’il déroula, coupa afin de poser par-dessus et de le coller à la peau de Marek, faisant tenir le pansement. Une fois les mains libres, il les posa au sol et se tourna vers le placard où il avait pris tous les outils. Il récupéra d’autres bouteilles d’alcool car il savait que Marek n’en aurait pas assez avec juste celle-là, puis il les posa devant ce dernier. Axel fouilla son manteau à la recherche d’autres mouchoirs, mais en vain. Il mit ses mains au sol et s’installa alors à côté de son ami, dos au mur et les jambes tendues devant lui, pour pousser un long soupir qui dissimulait le couinement qu’il aurait aimé sortir.
Au fond, ils ne s’en sortaient pas si mal pour des traqués. Face à des snipers, ils avaient échappé à la mort de peu. Surtout Marek, qui n’avait reçu la balle que dans l’épaule. En face, ce devait probablement être des novices, et c’était tant mieux. Mais Axel ne pouvait s’empêcher de penser que s’ils avaient eu affaire à des professionnels... Non, il ne valait mieux pas penser à cela. Le schizophrène se demanda durant combien de temps ils allaient naviguer avant de pouvoir rentrer. Avec ce froid terrible, il était convaincu qu’ils ne tiendraient pas plus d’un ou deux jours. Et ils n’allaient certainement pas rentrer à la nage, ce serait encore plus suicidaire. Ils allaient donc attendre un peu, histoire de tasser l’affaire. Et lorsqu’ils seront vraiment mal tous les deux, ils tenteront de rentrer. De toute manière ils n’avaient pas le choix. C’était soit prendre le risque de revenir sur le continent pour essayer de rentrer chez eux, si toutefois leurs ennemis ne les y attendaient pas, soit ils restaient là comme deux idiots qui attendent que le gel viennent prendre leur dernier souffle. Axel ne cessait de se passer la langue sur ses lèvres gercées. Ses doigts engourdis s’entremêlèrent sous son manteau. Il aurait aimé replier ses jambes pour se recroqueviller, mais ne voulait pas raviver la douleur à la cuisse. Il baissa un peu la tête pour cacher le bas de son visage jusqu’à son nez dans son écharpe, soufflant à l’intérieur pour se réchauffer les lèvres et le menton. Le regard dans le vide, il n’osait pas vérifier que le pansement de Marek tenait bien ou que sa blessure ne saignait toujours plus, de peur de se prendre une remarque de ce dernier. Qu’il s’offusque, et qu’il montre à Axel que lui aussi a une fierté. Le schizophrène n’avait pas tellement envie de parler, mais son ami allait probablement rompre le silence dans quelques temps. Et puis la pression autour lui semblait assez pesante. S’il voulait être certain qu’aucun des deux ne perde conscience, ne s’endorme ou ne meurt de froid, il valait mieux discuter, non ?
« Ça va mieux ? » demanda stupidement l’homme en regardant le sol devant lui. Bien sûr que non ça ne devait pas aller mieux avec ce froid, cette plaie et la situation dans laquelle ils étaient. Mais c’est la seule chose que trouva Axel à dire sur le moment.
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| | | Marek d'Alembert
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Mer 16 Fév - 12:10 | |
| Marek était habitué à la douleur psychologique, sous plusieurs formes. On avait souvent essayé de l’atteindre et, malgré les apparences, certains avaient réussi. Il s’infligeait lui-même de ce type de souffrance, avec cette culpabilité qu’il ne voulait pas chasser de sa conscience. Parfois, c’était presque comme s’il la rappelait volontairement, comme s’il la cherchait au fond de lui. Elle était la seule preuve qu’il lui restait pour essayer de croire qu’il n’était pas totalement horrible. Avec tout ce qu’il avait fait à ceux qu’il avait le plus aimé, si Marek ne s’était pas torturé avec les remords, il aurait été un vrai monstre. En soi, il en était probablement tout de même un mais, au moins, il le savait. Il pouvait donc essayer de tenir la partie de lui qui aspirait à la destruction de tout ce qu’il y avait de beau autour de lui le plus à l’écart possible. Il pouvait la détester et creuser toujours plus profondément l’espace béant que la solitude qu’il tenait à garder pour complice créait au fond de lui. De cette manière, il semblait au jeune homme qu’il se rachetait un peu pour tout ce qu’il avait fait, pour tous ces gens qui avaient souffert de son passage dans leur vie. Il se débattait tout seul avec le monstre et les morsures, les griffures et les cassures étaient le prix à payer pour avoir, pendant si longtemps, nourri cette moitié sombre dans laquelle il avait crû pouvoir se réfugier, à une époque. Maintenant, il commençait à comprendre que le malheur des autres ne le rendrait probablement jamais heureux. Alors, il essayait le contraire, pour compenser. Et si le malheur d’un seul pouvait racheter tout ce bonheur gaspillé?
Pour ce qui était de la douleur physique, en dehors de quelques coups inévitables, Marek n’avait pas beaucoup d’expérience dans le domaine. Il n’avait jamais été violent ou bagarreur, même en colère et même après avoir bu. Les solutions plus subtiles, les paroles ou même la fuite avaient toujours été ses premiers choix. D’ailleurs, quand il avait senti que les batailles étaient imminentes, Marek avait généralement préparé son corps en le modifiant imperceptiblement pour que les coups lui fassent beaucoup moins mal. Seulement, ce soir-là, il avait été imprudent. L’homme avait joué sur la chance sans compter qu’il devait l’avoir trop usée pour qu’elle lui serve une fois de plus. Il s’était pris cette balle avec une légère surprise et une bonne dose de douleur. Heureusement, il devait lui rester une dernière parcelle de chance, car Axel savait comment retirer le petit morceau de métal de son épaule. Cependant, il n’avait fallu que quelques secondes à Marek pour le regretter tellement c’était douloureux. Il songea même à proposer à l’autre homme de laisse la balle où elle était et d’attendre… Mais c’était sans compter l’orgueil du jeune homme. Il garda donc la bouche bien fermée en ravalant ces pensées un peu lâches alors qu’Axel venait à bout de petit objet qui torturait son ami.
Marek attrapa presque joyeusement la bouteille et la vida de trois grosses gorgées avant d’appuyer sa tête contre le mur derrière lui en fermant les yeux. La douleur, l’odeur du sang et de l’alcool, le stress causé par la situation et, peut-être, l’étrange proximité de l’autre homme lui faisaient tourner la tête. Le jeune homme rouvrit les yeux en entendant Axel fouiller dans le bateau et il remarqua le sang sur ses vêtements. Il était impossible qu’il ait lui-même autant saigné. Ce sang devait donc être celui de l’autre homme. Marek se sentit soudainement extrêmement mal. Occupé à fixer Axel, il remarqua à peine les bouteilles d’alcool qu’il déposait devant lui.
Dans quelle galère s’étaient-ils mis? Ils ne pouvaient pas rentrer maintenant… En fait, Marek ne pouvait pas dire s’ils pourraient rentrer avant plusieurs jours. Il savait qu’ils ne tiendraient pas plusieurs jours, et ce, même s’il y avait de la nourriture cachée quelque part sur ce foutu bateau. Les blessures d’Axel semblaient profondes. L’autre homme s’en voulut d’avoir été centré sur sa propre douleur avant de remarquer que son ami était aussi blessé. Il détailla les coupures du regard en se demandant ce qu’il pouvait faire pour aider. Le jeune homme n’avait pas l’expérience d’Axel et il n’aurait pas réussi à enlever si vite et si bien une balle de fusil d’une épaule. Marek se sentit excessivement incompétent, soudainement. Un incompétent frigorifié, d’ailleurs. Il faisait tellement froid qu’il doutait de pouvoir passer la nuit, soudainement, mais il se rassura vite en se rappelant sa tendance à toujours exagérer sa sensation du froid.
« Ça va mieux ? »
« Moi? Je suis au top de ma forme. »
Avec peine, et après une bonne gorgée d’alcool, Marek se décida à bouger et il se leva péniblement pour se diriger vers le placard où Axel avait pris les outils. Il le fixa quelques secondes en se concentrant sur son propre corps pour augmenter la masse musculaire du bras opposé à son épaule blessée. Puis, d’un coup sec, il arracha la porte du placard avant de la traîner jusqu’à la fenêtre brisée pour la mettre devant et couper un peu du vent glacial qui s’infiltrait dans leur abri.
« C’est mon tour de jouer à l’infirmière sexy. », dit-il en s’approchant de l’autre homme. Le plus rapidement qu’il le put, il enleva son propre manteau, puis sa chemise, pour ensuite remettre le manteau sans pouvoir retenir des tremblements. Foutu hiver. Marek attrapa des ciseaux, parmi les instruments de torture qui avaient servi à le libérer de la balle, et il découpa le vêtement en bandes qu’il imbiba d’alcool et qu’il appuya sur les blessures d’Axel du mieux possible, en essayant d’être efficace tout en évitant de lui faire encore plus mal. C’était probablement raté pour la deuxième partie. Un frisson plus gros que les autres parcourut Marek et il releva la tête de sur sa tâche pour demander : « T’as une idée de s’il y a moyen d’allumer le chauffage sur cette épave ? »
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Dim 20 Fév - 10:20 | |
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Il entreposait les bouteilles devant son ami, ne ressentant pas spécialement le désir de boire à son tour. Cela dit il tenta de se convaincre que ce serait une excellente solution pour résister au froid et à la douleur. Mais quel était cet alcool ? D’où provenait-il ? Quels genres de boissons buvaient les marins ? Marek ne semblait pas perturbé par cette question puisqu’il avait déjà commencé à se désaltérer. Posé à côté de lui, Axel ouvrit une bouteille et en regarda le contenu. Il s’en désintéressa lorsqu’il surprit le regard de son ami posé sur lui, ou plutôt sur le sang gelé qui recouvrait une partie de sa cuisse et de son épaule. Instinctivement, le schizophrène tira sur ses vêtements pour cacher ses blessures, ne voulant pas que l’on s’y occupe avant qu’il n’ait trouvé le courage de le faire lui-même. De toute manière il n’y avait rien à faire. À moins qu’une autre trousse de secours soit cachée quelque part dans cette cabine, il préférait ne pas y penser. Cela dit, c’était bien difficile d’ignorer cette douleur glaciale. Il sentait le sang tambouriner contre la plaie gelée, voulant absolument sortir. Il lui suffirait de gratter un peu le liquide glacé pour que ça se remettre à saigner. Son bras et sa jambe blessés étaient un peu engourdis et lorsqu’il soupira, une épaisse fumée blanche s’échappa de ses lèvres. Il ne savait pas ce qui était le pire entre la douleur et le froid. Marek semblait encore plus frigorifié que lui. Malheureusement il n’y avait aucune couverture dans ce bateau, et l’assassin ne connaissait pas le principe de la chaleur humaine. Il l’observa se lever puis pensa que c’était une excellente initiative, vraiment. Il faisait toujours aussi froid mais au moins le vent glacial arrêtera d’empirer leur état. Maintenant, l’homme rêvait d’être auprès d’une grosse cheminée, emmitouflé sous une tonne de couvertures et sirotant une tisane brûlante. Il donnerait beaucoup pour échanger sa place contre celle-ci. Lorsque le photographe revint vers l’employé d’AN, ce dernier se crispa. Non, il n’avait pas l’intention de le laisser le toucher. Il ne bougea cependant pas, se disant qu’il serait idiot de faire le fier au risque que ses plaies s’infectent. Surtout qu’il aurait lourdement forcé et insisté s’il était à la place de Marek. Cependant, en sentant l’alcool toucher ses blessures il ne put s’empêcher de prendre une grande bouffée d’air et de serrer fort les dents pour ne pas gémir.
Il détestait que l’on s’occupe ainsi de lui. Il finit par attraper les poignets de Marek pour les lui faire lâcher prise et s’empara de ces bandes de tissu pour les appliquer lui-même sur ses blessures, tout en poussant sur ses jambes pour s’éloigner un peu. Il était probablement ridicule mais ne voulait pas qu’on le touche, surtout là où ça faisait mal et surtout si c’était pour s’occuper de lui ! Il préférait encore souffrir en silence. Si Axel devait appliquer la règle « Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux pas que l’on te fasse », il deviendrait un monstre à temps plein. Il se fiche d’être frappé mais refuse d’être soigné. Comme quoi, il y avait de sérieux problèmes dans sa tête et surtout dans ses convictions. Il haussa les épaules à la question de Marek, ce qui lui valut une vive douleur dans l’une d’elle. Qu’est-ce qu’il en savait ? Vu l’état du bateau, il serait franchement étonnant qu’il y ait du chauffage. Même s’il y en avait, ils auraient toujours froid et mal. Ils allaient crever s’ils restaient là. Le schizophrène se leva donc en s’aidant du mur. Il cala l’un des bandages sur sa cuisse et laissa l’autre au sol. L’alcool avait légèrement dégelé ses plaies qui s’étaient remises à saigner mais il fallait avouer que le sang chaud qui coulait sur sa peau lui faisait un bien fou. Il s’appuya sur le tableau de bord pour mettre la main sur le levier et le tirer. Il fallait refaire démarrer le bateau, en espérant que le moteur ne soit pas congelé lui aussi.
« Il faut accoster quelque part. » déclara-t-il avant de se tenir lorsque le navire se mit à avancer, faisant trembler l’intérieur comme si un séisme se déclarait. Axel avait encore du sang plein les mains. Le sien et celui de Marek qui avait commencé à sécher ou bien à glacer. Il ne cessait de remuer les doigts pour garder la sensation de toujours les avoir. « Je pense pas qu’ils en avaient seulement après moi. » finit-il par dire. Il pouvait l’affirmer déjà grâce à tout ce qu’il avait réussi à capter de leur esprit, mais aussi parce que cela faisait des jours qu’il se promenait seul dans ce port. Pourtant, l’attaque n’avait démarré que lorsque Marek était apparu. Peut-être avaient-ils suivi ce dernier pour n’attaque que lorsque les deux cibles étaient ensemble ? Marek en était forcément une aussi, sinon ils ne lui auraient pas tiré dessus délibérément. Plus Axel y réfléchissait, plus il se posait des questions sur son ami. Qu’avaient-ils bien pu faire tous les deux ? Y-avait-il un rapport avec ce trou noir et flou que le télépathe percevait lorsqu’il cherchait à savoir ce que Marek faisait dans sa vie comme travail à part être barman ? Il y avait un nouveau mystère autour de lui. Et l’homme détestait les mystères. « Va falloir trouver pourquoi ils nous traquent si on veut les… retrouver avant. » Il allait dire les tuer, mais ne savait pas si c’était une attitude que Marek approuverait. En tout cas il était certain dans la tête d’Axel qu’il leur sera obligé d’ôter la vie à ces individus s’ils ne voulaient pas mourir les premiers. Enfin pour le moment, c’était quand même mal barré… En attendant, autant essayer d’en savoir un peu plus sur Marek et surtout sur la raison qui pourrait bien l’impliquer dans cette affaire louche de poursuite. Parce que voilà que maintenant ils étaient tous les deux coincés et blessés sur un navire qui avançait sans vraiment faire demi-tour, parce qu’ils n’allaient quand même pas retourner au port.
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| | | Marek d'Alembert
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Mer 2 Mar - 12:12 | |
| Marek avait commencé à boire sans réellement songer d’une manière précise aux présumées vertus de cette boisson contre le froid. Simplement, il avait vu l’alcool et cela avait été suffisant pour qu’il ait envie d’en prendre. Boire le réconfortait, de manière générale, que ce soit cette nuit-là, dans le froid et le sang, ou n’importe quelle autre, dans la solitude de son appartement. L’alcool lui semblait souvent être une potion magique dans laquelle il pouvait dissoudre ses problèmes, ses peurs et sa culpabilité. Plus il en prenait et moins il était conscient de la réalité. Marek aurait été tellement plus à l’aise dans un monde où le mensonge ne pouvait jamais se retourner contre lui. Malheureusement, même si la vérité était un concept qui terrorisait la plupart des êtres humains, ceux-ci la respectaient trop pour accorder une valeur réelle aux mensonges. Ils les utilisaient, mais ils refusaient qu’on leur en serve. La race humain était basse et illogique… Marek se savait d’ailleurs profondément humain. Il était un menteur invétéré, même avec ceux qu’il aimait vraiment. Surtout avec eux. Pourtant, il ne pouvait ignorer la griffure de l’amertume quand il réalisait qu’une personne l’avait trompé. Il n’acceptait pas d’être la victime. On n’abusait pas la confiance de Marek d’Alembert. C’était toujours lui le traître. Il ne fallait pas lui voler le rôle dans lequel il était le meilleur…
Il y avait longtemps que Marek entretenait une relation plus que privilégiée avec l’alcool, mais c’était seulement depuis son départ de l’hôtel que celui-ci était devenu un grand ami. Le jeune homme buvait plus que la moyenne des gens depuis quelques années mais, comme il tenait bien l’alcool, il fallait bien le connaître pour discerner combien de son argent y passait. Marek était passé maître dans l’art de la subtilité et il était probable que même Christo n’avait jamais remarqué que son copain buvait beaucoup. De toute manière, ce dernier ne lui avait toujours montré qu’une façade purement fabriquée de sa personnalité. Il avait été le petit ami parfait, en apparences. Toutefois, par manque de courage ou par accès de conscience, Marek avait laissé tomber. Il aurait pu, ensuite, se tourner vers Sara et essayer de bâtir quelque chose de vrai avec elle, mais il s’était enfui. Sous l’identité de Maverick, il lui avait pourtant montré une grande partie du vrai Marek, le côté dévasté par ses erreurs, tremblant mais solide. Il aurait pu faire des efforts et lui montrer qu’il l’aimait, mais il avait agi en lâche, comme s’il ne pourrait jamais faire autrement. Sara s’était donc juchée sur la montagne escarpée des regrets de Marek et ce dernier avait décidé de ne rien faire pour l’en faire redescendre. Il l’avait blessée, en partant sans s’expliquer, et il s’était fait du mal à lui aussi, mais il était trop tard maintenant. De toute manière, les mois avaient passé et, même s’il se donnait, un jour, une occasion de s’expliquer et s’excuser, il savait qu’il avait arrêté d’aimer la jeune femme. C’était toujours la même histoire, il aimait à la folie, puis il gâchait tout. Il ne lui restait alors que la certitude de ne pas savoir aimer et de ne jamais pouvoir l’apprendre. C’était pourquoi Marek repoussait toutes les personnes, voire même toutes les pensées qui auraient pu l’entraîner vers l’amour.
Heureusement, Axel n’était qu’un ami. Et il le resterait. Marek était persuadé que l’autre homme préférait les femmes, de toute manière, et c’était parfait. Il ne se posait pas de questions sur le sujet et il ne voulait même pas y penser. Tant que son esprit se concentrait sur le fait qu’Axel ne pourrait jamais être seulement vaguement intéressé, une sorte de barrière restait en place et lui permettait d’éviter le genre de danger qu’il essayait de ne plus rencontrer.
Marek faillit bien continuer à s’occuper d’Axel après qu’il l’ait repoussé, juste pour le narguer, mais il se dit que le moment était plutôt mal choisi pour ce genre d’humour. Il s’appuya donc contre un mur, debout, après avoir ramassé la bouteille entamée. Il savait que, s’il s’installait confortablement sur le sol, il risquait de s’endormir. Ce n’était pas vraiment conseillé, quand on était blessé et au stade de congélation précédent celui d’un repas surgelé. Axel fit avancer le bateau et, surpris par le mouvement subit du navire, Marek perdit équilibre et dut se rattraper de justesse à l’autre homme pour ne pas piquer directement vers le sol. Rapidement, cependant, il retira ses mains de sur le corps de son ami, en espérant ne pas avoir touché ses blessures. Il songea presque qu’il aurait dû se laisser tomber, finalement.
« Je pense pas qu’ils en avaient seulement après moi. »
Pour seule réponse, Marek regarda l’horizon avec un air assez grave. Il se doutait bien que les tueurs en avaient après lui et il se demandait même si ce n’était pas exclusivement après lui. Peut-être était-il destiné à être le cadavre de Noel d’un quelconque gangster de San Francisco. Il s’imagina, pendant une seconde, avec une balle dans le cœur et un gros chou rouge collé sur la tête. Charmant.
« Va falloir trouver pourquoi ils nous traquent si on veut les… retrouver avant. »
Marek resta pendant plusieurs secondes le regard toujours fixé au loin, sans rien dire, avant de se tourner vers Axel.
« Facile : ils nous traquent pour nous tuer. Pas besoin de chercher dix pages de justifications pour le moment, ça va nous faire perdre du temps. On les trouve, on les bute et on les fouille. Ensuite, on avise. » Ce n’était pas tout à fait le plan du siècle, mais Marek ne savait pas comment éviter l’interrogatoire imminent d’Axel. Il savait qu’il n’avait pas le droit de lui en parler et il ne voulait pas lui mentir. C’était très étrange pour lui, d’ailleurs, de ne pas avoir envie de mentir.
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| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Mer 23 Mar - 19:07 | |
| Axel n’était déjà pas très à l’aise avec beaucoup de personnes mais se retrouver seul avec Marek était en soi une épreuve qu’il ne s’imaginait pas vraiment passer. Surtout en pleine période de noël, d’ailleurs. L’homme était blessé, son compagnon aussi, et la situation voulait qu’ils soient totalement perdus dans un navire sur l’océan. Rien à bâbord et rien à tribord, ils ne savaient même pas où les vagues menaient la coque. Si la mère les ramenait sur la terre ferme, ou bien si au contraire elle jouait malicieusement à les éloigner d’une quelconque rive, afin de prolonger leur supplice et d’y instaurer une issue fatale pour eux deux. Entre autre, ils avaient peut-être intérêt à réagir vite s’ils ne désiraient pas donner leur âme au froid glacial qui rentrait par les brèches de cette fenêtre de fortune que Marek avait installé. Et le bruit du vent sur le carton rappelait sans cesse à Axel qu’ils n’étaient peut-être à l’abri qu’ici. Il avait l’impression que ces grésillements aigus retentissaient comme une voix de fantôme. Une voix qui hurlait leur perte et qui les maudissait durant des générations. Lorsque les rafales s’intensifièrent il frissonna, laissant courir l’idée qu’une bête s’était tapie sur le bateau pour mugir sa douleur. Finalement, la raison reprit le dessus, et il affirma une partie d’un plan possible pour s’en sortir. Retrouver la côte, rentrer, et mettre fin à la menace qui leur pesait sur la tête à tous les deux. La réponse de Marek l’agaça plus qu’autre chose. Le fait qu’il ne soit en aucun cas innocent dans cette affaire ne le rassurait déjà pas, mais l’entendre proposer quelque chose de suicidaire le fit rester totalement de marbre.
« Bien sûr. Et ils se laisseront gentiment faire tandis qu’on les enverra dans l’autre monde. » répondit calmement Axel en passant son regard sur le tableau de bord. Il jaugea la boussole incrustée, indiquant qu’ils étaient tournés vers le sud-est. Ils venaient actuellement du nord, et l’homme espérait que son sens de l’orientation ne le trompait pas. Il actionna de nouveau le levier pour faire partir la machine et tenta de faire tourner le bateau pour revenir vers une côte. Certainement pas au port parce qu’ils étaient probablement attendus, mais peut-être qu’en longeant la côte de San Francisco, ils finiront par trouver un lieu désert et sûr où accoster et laisser définitivement le bateau. (À moins de le couler.) Plutôt que de foncer dans le tas avec la certitude d’y laisser sa peau, Axel était plus dans l’idée d’élaborer un plan de fuite, le temps d’en confectionner un autre pour la riposte. Auront-ils besoin de trouver un costume pour fuir ? Où aller ? C’est ce à quoi il réfléchissait tandis qu’il faisait naviguer la barre sans vraiment se concentrer sur l’horizon. Si seulement il avait pris la peine d’approcher l’un de ses hommes pour lui soutirer une information sur leur identité et la raison pour laquelle ils en avaient après eux. Peut-être étaient-ils cachés près des maisons d’Axel et Marek, attendant patiemment que ces derniers rentrent chez eux pour les achever.
« On leur rentrera pas dans le tas. On va guérir les blessures, déjà, avant de trouver autre chose. lâcha-t-il en se surprenant lui-même de faire preuve d’autorité. Peut-être était-ce parce que la vie de Marek était en jeu, qu’il faisait alors attention à la sienne aussi ? Axel restait buté sur cette idée. Et même s’il lisait plusieurs gênes dans la tête de Marek, que ce dernier lui cachait visiblement quelque chose que seule sa parole aurait pu dévoiler à Axel, le schizophrène ne lui demanda rien. Il n’était pas vraiment curieux. De plus, c’était bien le premier à respecter qu’autrui ait des secrets, vu tout ce qu’il cachait lui-même. Il espérait simplement que si les secrets de Marek avaient un risque de mettre en péril leur vie ou bien même son travail, il ait l’obligeance de le prévenir afin d’éviter à Axel toute mauvaise surprise. L’homme ressentait une douleur folle lorsqu’il bougeait son épaule ou sa cuisse. Comme si le froid prenait l’effet d’un jus acide qui jouait sadiquement à lui écarter les coupures tout en le maintenant en vie. Comme si le sang qui coulait encore à petite dose n’avait pour fonction que d’encourager cette torture qui commençait sérieusement à brûler le tueur. Et la chemise de Marek frottait, irritait la plaie en même temps qu’elle contenait le sang et en absorbait ce qu’elle n’arrivait pas à empêcher de sortir. Passant sa main dessus, Axel sentit des morceaux de verre incrustés dans sa peau un peu autour. Continuant de mener le bateau, il aperçut bientôt une côte de gros graviers grimpant dans une pente bien raide. Les vagues s’entrechoquaient sur la base et l’homme doutait même de pouvoir mener le navire jusque-là bas sans que la coque ne se prenne dans un des rochers glissants sous l’eau, qui remontaient à peine à la surface.
Cependant il n’y avait personne autour. Pas une seule silhouette sur ces cailloux alors ce pouvait être la chance des deux hommes d’accoster sans se faire prendre, malgré les rochers glissants sur lesquels ils devront marcher. Et puis s’ils perdent le bateau en arrivant ce n’était pas bien grave, puisque ce n’était pas le leur. Il dirigea le navire vers ce lieu, se penchant bien en avant pour tenter d’apercevoir les obstacles naturels et ainsi les éviter. S’ils pouvaient aller le plus loin possible et ainsi atteindre plus facilement les graviers, autrement dit la terre ferme, c’était bien mieux que de devoir sauter rocher par rocher au risque de se rompre le cou en glissant, ou la jambe en se la coinçant.
« On essaye d’aller là ? Il n’y a personne, et la vue est dégagée. » Malgré les nombreux flocons de neige, on voyait clairement devant soi. Aucun arbre ou obstacle encombrant ne pouvait cacher un éventuel tueur, ce qui confirmait leur solitude. À moins que des personnes ne soient invisibles, bien sûr. Mais là, peut-être qu’Axel captera la présence de leur esprit… Si ce n’est pas trop tard.
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| | | Marek d'Alembert
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Messages : 4735 Date d'inscription : 15/04/2010 Localisation : Au port, à regarder la mort entre les vagues.
| Sujet: Re: L'illusion de Noël [Marek] Ven 17 Juin - 20:04 | |
| Quand on essayait d’analyser Marek et son amertume à peine dissimulée envers sa famille, on avait l’impression qu’il avait fui une famille étouffante et purement mercantile. Il paraissait être le pauvre petit artiste atterri dans une horde de robots préfabriqués pour être pareils les uns aux autres. Pourtant, une personne normale qui serait allée passer du temps chez les d’Alembert n’aurait pas catégorisé la famille comme des gens insensibles et complètement obsédés par l’argent. Bien sûr, il y avait un peu de cela… On ne pouvait pas évoluer dans un milieu se voulant d’une noblesse indiscutable sans se plier aux jeux dont les règles étaient écrites depuis des centaines d’années. Cependant, entre les murs de la maison, derrière les portes closes et les rideaux tirés, les d’Alembert n’étaient pas si insensibles et quasiment parfaits qu’ils en donnaient l’impression en public. Ils avaient leurs défauts, et même une certaine sensibilité que Marek peinait à leur concéder. C’était certainement le cas de toutes les familles influentes, au fond. On se montrait sous notre meilleur jour, exhibant fièrement les masques que tous les autres espéraient voir, et on les rangeait, le soir, quand plus personne ne regardait.
Néanmoins, et c’était peut-être parce qu’il était lui-même si attaché à ses propres mensonges, Marek ne pardonnait pas à sa famille d’être si à l’aise dans un milieu duquel elle se moquait presque autant que lui. Il était parti à la fois pour changer d’air, pour découvrir autre chose et pour leur prouver que, lui, il n’était pas esclave de cette vie qu’ils avaient choisie et pour laquelle ils faisaient encore des sacrifices. En fait, il avait fait exactement comme sa grand-mère, qu’il admirait tant, à la différence que lui n’avait pas abandonné ses enfants…
L’idée de Marek de se jeter comme des cons sur des tueurs expérimentés et espérer stupidement en sortir vivant n’était pas tout à fait l’idée la plus géniale qu’il ait eue dans sa vie. Néanmoins, on y reconnaissait l’esprit extrême qui caractérisait le jeune homme. Pas de demi-mesures…sauf lorsqu’il les calculait lui-même pour obtenir l’effet voulu sur une victime de son charme. Lorsqu’il travaillait pour Irradiant Light, Marek se montrait plus intelligent qu’en ce soir de Noël. Ses plans avaient généralement la subtilité dont ses connaissances avaient l’habitude et ses actions étaient finement calculées. Il était un très bon élément de l’organisation (et il le savait…), en grande partie à cause de son pouvoir magique, mais surtout parce qu’il était doué pour abuser tout le monde. L’infiltration était quelque chose de très facile pour lui; il était beaucoup moins anxieux que les autres membres d’IL lorsqu’il se retrouvait en milieu ennemi. Il se faisait confiance : il finissait toujours par s’en sortir.
Toutefois, ce soir-là, sur le bateau, avec une blessure et en compagnie d’un de ses seuls amis, Marek n’arrivait pas à être particulièrement brillant. Il mit cela sur le compte du choc. En fait, c’était plutôt cette conne de culpabilité qui ne le lâchait pas, une fois de plus. Chaque seconde qui passait, chaque craquement du bateau, chaque vague qui venait éclater contre sa coque, chaque lame de vent qui lui tranchait la peau lui criaient qu’Axel avait failli se faire tuer à cause de lui. Quelque temps plus tôt, il avait raté une mission et sa cible s’en était tirée. Marek était maintenant persuadé que l’homme qu’il devait éliminer l’avait identifié et que c’était pourquoi des mercenaires l’avaient pris en chasse, même si c’était Noël. Il se maudissait intérieurement d’avoir décidé de voir Axel, ce soir-là, plutôt que d’avoir choisi de poursuivre ses recherches sur celui qui, maintenant, avait une longueur d’avance sur lui. S’il fallait qu’Axel se fasse tuer…
Marek regarda attentivement les manœuvres de l’autre homme pour approcher le navire d’un lieu où ils pourraient peut-être se mettre en sécurité, et il eut une petite pensée pour le propriétaire de l’embarcation qui, avec de la chance, retrouverait peut-être son bateau dans un état à peu près correct… Mais c’était sans compter les risques évidents de dérive, si jamais ils le laissaient là, ensuite. Et ce pauvre propriétaire ne se douterait probablement pas que deux types poursuivis par des tueurs professionnels s’étaient emparés de son cher bateau.
L’idée d’Axel de descendre du bateau semblait bonne. Aussi, une fois le bateau suffisamment proche du bord (peut-être même un peu trop, mais il s’en fichait bien), Marek s’affaira à libérer la sortie. Puis, même si son corps aurait préféré rester barricadé dans un semblant de chaleur, il sortit de la cabine pour établir comment ils descendraient du bateau sans se blesser, puisqu’il n’y avait pas de quai, comme au port. Le sol était plutôt loin, car le bateau en était un assez gros, donc assez haut, et il n’allait certainement pas faire sauter son ami blessé.
« Peut-être si on avait une corde… », fit-il en fixant le sol. « L’ancre. L’ancre est forcément attachée à une corde. »
Marek partit donc à la recherche de l’ancre, bien décidé à ne pas laisser son ami se briser encore plus de membres… Il entreprit ensuite de la détacher pour pouvoir utiliser la corde pour descendre.
« Comme ça, on peut faire un genre d’effet de poulie, comme pour l’escalade. »
Puis, sans lui demander son avis, il commença à attacher l’autre homme pour le faire descendre en premier et, de cette manière, mieux superviser sa descente.
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